Reality Testing
7.1
Reality Testing

Album de Lone (2014)

Par Fréderic Gendarme

Depuis le coup d’envoi de sa carrière de producteur dans sa chambre d’adolescent de Nottingham, Matt Cutler développe une œuvre constellée de couleurs flashy, avec une inclination pour les changements de cap et les revirements impromptus. Parti d’une production qui creusait son sillon entre electronica et abstract hip hop autour de 2007-2009 - notamment avec Ecstasy & Friends sorti sur Werk Discs, le label d’Actress -, il tente une première embardée vers la piste de danse avec Emerald Fantasy Tracks, suivi de Galaxy Garden, le premier de ses albums à sortir sur R&S – une consécration pour ce rejeton de la house, du hip-hop et de l’electronica la plus bariolée. Paru en 2012, ce jardin baroque faisait figure de dripping fluo jeté sur sa carrière, une aventure en forme de parenthèse dans laquelle Lone empruntait une énième bifurcation, au risque de se transformer en un Blob multicolore.

A partir de là, que restait-il à faire ? Poursuivre dans l’excès, quitte à frôler l’embolie, ou calmer le jeu pour se recentrer sur les fondamentaux qui animaient ses rêves d’antan, ceux qu’il essayait de formuler depuis les quatre murs de sa chambre ? A cette question, Reality Testing opte pour la seconde option, se démarquant formellement de son prédécesseur par un certain apaisement. A des années-lumière de Galaxy Garden, Lone questionne ici sa propre musique et la forme qu’il souhaite lui donner, sans céder à une inflation de sound effects ni recourir à une technologie en surrégime.

En dépit de cette diète drastique qui l’a vu naître, Reality Testing s’appuie sur de grosses ficelles et sur une jonction bancale entre les styles, où house et hip hop se réduisent aux plus stricts gimmicks, entre un riff de piano (Restless City) et un rythme boom-bap (2 is 8) alors que Jaded n’attend plus qu’un rappeur de chez Stones Throw pour s’engouffrer dans la nostalgie.

Bercé par une mélancolie qui traverse le moindre sample, Reality Testing rattrape par son fond doux-amer la maladresse formelle de certains morceaux. Lone a rassemblé ici toute sa carrière, afin d’en extirper la substance la plus limpide qu’il soit, comme une manière pour lui de renouer bon gré mal gré avec une réalité qu’il cherchait jusqu’à présent à contourner.
Chro
6
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le 3 juil. 2014

Critique lue 191 fois

Chro

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