Pour le plus grand bonheur des marchands d'antidépresseurs, le précédent album de Jude, Sarah, combinait, il y a deux ans, chronique d'une rupture amoureuse et prouesses vocales de nature à entraîner chez le commun des tontons fredonneurs une épidémie de nervous breakdown. Mais sur la pochette de Redemption, l'ancien étudiant en philo partage sa guitare avec un enfant épanoui, si bien que l'on craint d'abord qu'à force de baigner dans le psycho-babil de sa Californie d'adoption Jude ait trouvé son ?inner child? ? au pays des mirages thérapeutiques, rédemption rime parfois avec régression. A l'écoute du disque, ces appréhensions se volatilisent : sous des violons à ailes de chérubins pointe la causticité acide qui fait depuis No One Is Really Beautiful le sel des chansons de Jude. En sus de quelques roucoulades racées, Jude s'offre le genre de ballade bleu Orbison dont Chris Isaak a depuis une dizaine d'années égaré le secret (Dreaming), chante et joue du piano comme un John Lennon qui aurait grandi dans une banlieue soul de Philadelphie et laisse à l'occasion son cerveau au vestiaire pour balancer sur la piste de danse d'irrésistibles bombes de metal bubblegum (Run to My Room). Au lieu de prendre la pose devant son micro ? ce que justifierait pourtant des cordes vocales abritant autant d'oiseaux exotiques que la discographie entière des Bee Gees ? Jude a cette fois pour priorité de dérider et dévergonder l'auditeur. Et flirte à cette fin avec le sacrilège : dans Taking More and Giving Less, une hilarante ode à l'égocentrisme sexuel et au strip-tease masculin rôde sous la chaste chasuble du gospel.(Inrocks)
C’est avec une joie certaine que l'on accueille le cinquième album de Jude, intitulé "Redemption". Après quelques années de vaches maigres, l’américain nous est revenu l’an passé avec le somptueux album "Sarah". Composé à la même époque, ce "Redemption" n’a pourtant rien à voir avec son prédécesseur.
Début en fanfare, comme le prouve ce très orchestré Save me, accrocheur, racoleur même, serait-on tenté de dire. Le single actuel Love, love, love est du même acabit. Run to my room par contre séduit avec ses résonances délicieusement rétro et ses harmonies vocales à la manière des Beach Boys. On retrouve avec plaisir les paroles plutôt croustillantes auxquelles Jude nous avait habitués, souvent tristes mais toujours avec cette pointe d’humour et d’auto-dérision ; Money en est une bonne illustration, Beautiful loser et Break-up song également. Puis vient le cas de Stay. La midinette au fond de nous a beau s'évertuer à répéter qu’il s’agit d’une chanson poignante au romantisme exalté, objectivement on n'entend qu’une énième bluette aux paroles convenues ; tout ceci est un brin décevant et surjoué pour être sincère. Fly Again par contre, fonctionne bien dans un style approchant et semble clore l’album, or le plus étonnant reste à venir. Taking More and Giving Less qu’on jurerait être une reprise d’un autre temps, est en fait une composition originale dédiée à un ami. Enregistrée en public, elle produit son effet car elle semble réellement à part sur ce "Redemption". Mais on se surprend à chantonner les mélodies et à savoir les paroles par cœur sans avoir jamais pensé que cela arriverait. L’oreille s’habitue-t-elle à ce son nouveau pour Jude ou est ce la spécificité même d’une œuvre d’exception qui ne se révèle pas à la première écoute? Jude donne dans la variété et vise large, il saura s’attirer un public nouveau tandis que son auditoire plus ancien risquera d’être dérouté. À vous de juger…(indiepoprock)