Hector Zazou – Reivax Au Bongo (1985)
Avec cet album d’Hector Zazou on va transcender les genres pour entrer dans un monde fantastique et fantaisiste, fait d’humour décalé au service d’un d’imaginaire poétique et parfois enfantin. Sur la pochette du vinyle un autocollant annonce : « Roman Photo à l’intérieur – Photo novel Included » l’ouvrage de bonne taille est en effet traduit en anglais, pour que personne ne perde le fil de ce roman-photo absolument passionnant !
La pochette nous montre une vignette de l’ouvrage, elle est légendée ainsi : « Reivax (le héros) se sent troublé par tant de grâce, tant de beauté », sur la vignette suivante : « Mais d’abord, reprend la voix sucrée, mange un peu de ce délicieux gâteau cuisiné par mes mains ». Reivax va-t-il prendre une part de ce gâteau ? Le suspense est haletant, mais hélas je ne puis vous en dire plus, sans risquer de devoir payer de fortes pénalités financières pour défloration littéraire, je vous engage donc à vous tourner vers un exemplaire en vente dans le commerce, ainsi vous aurez accès à l’entièreté de l’œuvre.
Nous voici donc transportés au Bongo, un pays fictif créé de toutes pièces pour les besoins de la cause. Pour donner corps et vie au récit, trois chanteurs Congolais officient, Bony Bikaye, Kanda Bongo Man et Ray Lema qui joue également des percussions, des sommités du genre à l’époque. Une pléiade de musiciens sont également présents sur cette première face, pour faire vite je n’indique que les instruments, violons, violoncelles, basson, flûte, clarinette, saxophones, guitares, vibraphone, marimba, ainsi que piano et synthé pour Hector Zazou et Medor Mader, il faut également ajouter des percussionnistes.
La première face est ainsi entièrement sous influence africaine, c’est là le décor dans lequel évolue notre héros, Reivax, qui doit faire face à Zorello, son ennemi de toujours, ce dernier veut renverser le bon roi Lolo X. L’Afrique ici n’est pas tumultueuse, ni festive, ni même très expressive, c’est que le mal est sournois et l’atmosphère est souvent fiévreuse et inquiétante. Le décor dans lequel nous évoluons est certes exotique, mais dans une ambiance de film d’espionnage, avec du suspens, des incertitudes et quelques mystères. Tout cela est parfaitement rendu sur la face une, vraiment épatante.
Le second volet est très différent, ainsi, dès le premier titre « Que le Bongo Est Beau » on entend la cantatrice mezzo Catherine Renoult prendre le relais des parties chantées. Hector Zazou au synthé tapisse un fond sonore adéquat et Philippe De La Croix Herpin joue des saxophones et de la clarinette basse. Les techniques du re-recording sont également utilisées.
L’Afrique se cache et ne subsistent que de lointains effets percussifs alors que la voix de la cantatrice navigue au-dessus des ondes électroniques et des effets émis par les synthés. Tout est flottant, spatial, immatériel et onirique, ainsi nous sommes transportés dans un monde de limbes, flou, entre rêve et réalité, folie et raison.
Un objet absolument inclassable, imaginé par un musicien iconoclaste que je vous engage à écouter si l’occasion se présente à vous.