Elvin Jones – Revival (Live At Pookie's Pub) – (2022)


Le dix-sept juillet mille neuf cent soixante-sept à Huntington, Long Island, John Coltrane a quitté ce monde, laissant un grand nombre de personnes orphelins, tristes à mourir, plus rien ne sera plus comme avant. Il en avait tourné des pages, pour aller plus loin, toujours plus loin, au-delà des choses, des mondes visibles, dans un endroit où lui seul a réussi à nous emmener…


Parmi ces pages il y en eut de douloureuses, la séparation du quartet idéal, fin soixante-cinq déjà, la déchirure… Elvin est parti vivre sa vie, douze jours après le décès de Trane le voici qui entre au Pookie's Pub, au centre-ville de New York. Cet album nous raconte comment ça s’est passé et la musique qui fut jouée.


Il y a quelque chose qui fait peine à montrer, au travers des enregistrements: ce qui était si particulier chez Elvin Jones. Pour comprendre il faut savoir que le jeu d’Elvin était si puissant, si phénoménal, qu’il faisait trembler le sol et vibrer la vaisselle, Coltrane au beau milieu de ce chaos devait souffler à pleine puissance, tout donner, pour seulement espérer se faire entendre. McCoy Tyner devait batailler à fond avec sa main gauche, marteler sans cesse pour devenir audible et Jimmy Garrison gratter et frotter fort les cordes de sa contrebasse, heureusement, Elvin, de temps en temps, pausait et levait le pied.


C’est cette surpuissante énergie qui plaisait tant, autrefois… avant que ne vienne le temps de tout rebâtir. Elvin, lui, a continuité sa marche, ne changeant rien à son jeu, on l’entend ici, dans le canal droit, impressionnant. Il a recruté un autre « Coltrane », dans un autre format, plus petit, moins historique, mais quel musicien ! Généreux, grand technicien, comme tous les autres il est à la remorque du géant, mais il en recherche les tours, et essaient d’en faire le détour, il s’appelle Joe Farrell, il joue du sax ténor et de la flûte.


Il y a également Billy Greene au piano, il ne sera jamais McCoy Tyner, il le sait bien, mais déjà être soi-même c’est beaucoup, et il donne tout ce qu’il a. Et puis un grand à la basse, Wilbur Little qui va bien et fait parfaitement l’affaire.


Ils stationnent tous dans ce post bop avancé qu’a autrefois tracé Coltrane, avec d’autres, mais enfin, on pense surtout à lui… Et Elvin, et le groupe d’Elvin aussi, tous pensent à lui. Et ça s’entend, même si, au répertoire, aucun titre du défunt ne figure, il y a sûrement une raison à ça ! On ouvre avec « Keino’s Birthday March », un titre d’Elvin, le seul joué ce soir, on peut y admirer le jeu du batteur, droit, direct, net, les battements, une leçon de batterie, et Fareell qui souffle, déjà grand.


C’est un double Cd car les titres sont longs, une orgie de musique cet album, absolument faramineux, mais il faut que je vous parle de la flûte car Farrell en joue vraiment bien, avec une véritable couleur jazz, sur « My Funny Valentine » ou « On the Trail », magnifique !


Sonny Rollins est ici avec le dernier titre de l’album, le dantesque « Oleo », de quoi quitter l’album avec un petit pincement. Des standards, nombreux, presqu’en pagaille, « 13 Avenue B » énorme, c’est un rêve ! « Softly As In a Morning Sunrise » version splendide, une des meilleures, c’est sûr…


Bon il y a également un gros livret joint, en anglais, avec des photos, c’est un album Blue Note qui existe également au format trois LPs, pour ceux qui peuvent.

xeres
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le 18 juil. 2023

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