Les débuts des Residents en 1972 sont marqués par l'humour, faut-il en être étonné ? ... mais attention un humour teinté de noir et de dérision ... Tout d'abord ils décidèrent d'envoyer 300 exemplaires de leur premier single à des amis ou ennemis, tels Frank Zappa ou Richard Nixon, ce dernier refusant la réception de l'envoi : https://www.residents.com/historical/media/image/Refused.jpg. Il faut aussi savoir que le nom du groupe fût choisi après qu'Hal Halverstadt, de la Warner, ait rejeté une bande qu'ils lui avaient envoyé. Aucun nom n'ayant été communiqué avec l'enregistrement, la note indiquant son rejet fut simplement adressée aux "Residents" de l'immeuble mentionné comme adresse de retour. En effet, quoi de plus anonyme qu'un résident ? Cet anonymat sera consolidé par la "théorie de l'obscurité" d'un certain Nigel Senada, théorie qui veut qu'un artiste est à son meilleur quand il est inconnu et que personne ne sait qui il est. L'idée sous-jacente à ce principe est qu'une fois que l'artiste devient connu du public, alors le public commence à imposer des exigences à l'artiste et cela devient impossible pour l'artiste de ne pas être influencé par ces exigences. C'est cette théorie qui les conduira à masquer leurs identités.

Venons en à la pochette ... déjà, le titre est provocateur : "Santa Dog" étant l'anagramme de "Satan God" ... l'image du chien fût inspirée par une photographie retrouvée accidentellement dans leur premier studio et représentant un chien déguisé en Père Noël : https://www.residents.com/historical/media/image/thumbs/SantaDogPolaroid.jpg. L'intérieur de la pochette représentant différents désastres d'une police d'assurance suggérés par les titres (Fire, Explosion, Lightning, Aircraft Damage) : https://meettheresidents.fandom.com/wiki/Santa_Dog?file=Santadoginnergraphic.png. On remarquera ainsi tout le soin qu'ils décidèrent d'apporter à la présentation de leur produit.

Et maintenant le contenu : chacune des chansons est créditée d'un nom de groupe ou d'artiste fictionnel, chacune étant interprétée vocalement par un membre du groupe différent. La particularité de ces enregistrements étant l'utilisation pionnière de samples.
- Fire est la chanson "thème", plus conventionnelle et mélodieuse
- Explosion débute par la mélodie "Jingle Bells" qui s'écroule dans des gémissements angoissants de violons, cors et piano enfantin rudimentaires.
- Lightning est un pastiche de musique concrète, mélange sophistiqué de percussions superposées et de poésie idiote.
- Aircraft Damage est fait de boucles de sons, de rythmes échantillonnés, de bruits non identifiés et d'un refrain surréaliste. Cette chanson faisant partie d'un projet futur appelé "Vileness Fats".

On assiste ainsi à une déconstruction musicale, anti-art, kitsch et reflètant la contre-culture des années 60 et ce qu'on appelle communément le DIY (Do It Yourself), c'est-à-dire l'autoproduction. Le tout couronné d'un humour "non sense" de bon aloi fait de collages amusants et d'idées bizarres.

Comme si tout cela ne suffisait pas, ils décidèrent de réenregistrer la chanson "Fire" tous les 6 ans. Ils l'ont effectivement fait une fois, en 1978, mais en commençant la production sur Santa Dog 84, ils ont réalisé que leur son n'avait pas assez changé depuis 1978 et ils ont donc choisi de le réenregistrer chaque fois que leur musique avait changé. Il y eut donc des versions en 1988, 1992, 2006, 2012, 2017 et 2022.

https://www.youtube.com/watch?v=j6UoYi1EADs

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le 5 févr. 2023

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