Après une période difficile avec un tas de poursuites judiciaires et des problèmes avec les majors, FZ décide de dire au revoir à tout le monde en 1979 et de devenir un artiste indépendant en créant son propre label : Zappa Records !
Sa première publication, "Sheik Yerbouti", sera ouvertement commerciale. La pochette le représentant en cheikh est accrocheuse, tout comme le titre faisant directement référence au morceau "Shake Your Booty" (Secoue ton derrière) de KC & the Sunshine Band.
L'album est basé sur des enregistrements en public inédits de la tournée européenne de 1978. Ils ont ensuite été doublés en studio. Cela a été doublement profitable, car il a réussi à garder en vie la plupart de la créativité spontanée du live tout en profitant de la valeur de production du studio des années 70.
Ce disque marque aussi le début d’une excellente période en termes de réussite commerciale, et contient un titre qui se classe no 1 en Norvège et en Suède : Bobby Brown. Dans le groupe qui l'accompagne alors, le batteur Terry Bozzio, le bassiste Patrick O'Hearn, le guitariste Adrian Belew et le claviériste Tommy Mars se coulent parfaitement dans l'esprit et la technicité de sa musique. Les arrangements des choeurs sont divertissants, il y a une interaction folle entre les différents chanteurs du groupe. Adrian Belew met son empreinte indélébile sur 3 morceaux, tandis que Terry Bozzio s'avère être un chanteur délirant. Les paroles s'avérant souvent être grivoises et vulgaires.
Les morceaux s'égrènent, on commence par un morceau sensuel (I've Been in You, sorte de morceau disco-soul-rock, version satirique d'un morceau très populaire de Peter Frampton), pour poursuivre avec un morceau tubesque (Flakes, où Adrian Belew parodie parfaitement Bob Dylan), puis du rock lourd (Broken Hearts are for Assholes), du boogie hard rock parodiant les Ramones (I'm so Cute, où Terry Bozzio nous gratifie d'hurlements féroces, se moquant des rock stars sexy et de leur ego), un court collage (Jones Crusher, avec la voix et la guitare éléphantesque d'Adrian Belew), un autre collage instrumental dédié à la guitare électrique, morceau nominé pour un Grammy Award de la "meilleure compo instrumentale" (Rat Tomago), puis l'énorme tube (Bobby Brown) suivi d'un morceau instrumental mettant en valeur la basse de Patrick O'Hearn (Rubber Shirt). Le premier disque se terminant sur un tango à la guitare électrique.
Si on s'arrêtait là, on aurait déjà un album réussi, mais le meilleur est encore à venir. La deuxième galette commence sur les chapeaux de roues, avec un autre morceau tubesque (Baby Snakes), de nouveau du hard avec Terry Bozzio et sa voix déchirée (Tryin' to grow a chin), puis un très beau morceau mettant en valeur la voix particulière d'Adrian Belew, le tout agrémenté d'un excellent solo de guitare à l'unisson entre FZ et Adrian Belew (City of Tiny Lights). Comme si tout cela ne suffisait pas, on a de nouveau droit à deux sortes de tubes idiots : "Dancin' Fool" (satire disco, morceau qui sera nominé pour le Grammy Award du "meilleur vocal masculin") et "Jewish Princess". La dernière face propose le seul morceau un peu faible de l'album (Wild Love) avant de terminer sur un long morceau somptueux et envoûtant, mettant en valeur le côté charnel de sa guitare électrique (Yo' Mama). L'album se terminant ainsi comme il avait commencé.
Cet album se révèle être, malgré (ou grâce à) son côté pop, un parfait point d'entrée pour découvrir son univers de manière ludique. On y trouve son humour ravageur, d'excellents instrumentaux, des soli de guitare, des enregistrements de groupe, de superbes mélodies et quelques bizarreries expérimentales, des parodies, des tubes, des ballades fleur bleue, ... en fait tout ce pour quoi on aime FZ.