Sleepdrunk Seasons
7.3
Sleepdrunk Seasons

Album de Hjaltalín (2007)

Typique de ces collectifs tripy-arty auxquels semblent appartenir 92% des 18-24 ans de Reykjavík, Hjtatalín fut, pendant des mois, une seule chanson : l'incroyable Goodbye July/Margt Að Ugga, qui virevoltait sur le net avec grâce et exaltation. A se demander même si ce mystérieux collectif de neuf membres mais à l'unique chanson n'était pas, en fait, une plaisanterie anonyme de Sígur Ros : même orfèvrerie pop, même maniaquerie sur le magma sonique, même grandeur des refrains. Mais non : avec ce premier album, une personnalité s'impose, à la fois timide et exaltée, humble et orgueilleuse. Autant influencé par une pop pharaonique (Sufjan Stevens, Antony, Thomas Dybdahl ou leur compatriote Benni Hemm Hemm…) que par la musique baroque ou, à l'inverse, impressioniste (une chanson s'appelle Debussy), Hjaltalín passe ainsi d'un fanfare onirique à un murmure plaintif, les pieds fermement campés dans l'irréel. C'est peut-être parce que la tornade économique a déjà violemment atteint les côtes islandaises que se groupe se vautre avec autant de luxe et de délectation dans le dénégation de tout marasme. Jouant dans une opulence insolente (hautbois, basson…), cette musique résolument escapist ignore ainsi tout des plans d'austérité, de la realpolitik musicale, de 2009. “I lie”, dit une chanson. Leurs mensonges sont tellement plus beaux que la vie. (Inrocks)


L'avenir appartient aux rêveurs. Hjaltalín, à égale distance de Yalta et de Staline, est un groupuscule islandais de néo-hippies qui n'a rien trouvé de mieux à faire, en pleine crise économique, que de détourner la ménagère angoissée par la baisse de son pouvoir d'achat en ouvrant sa porte et ses fenêtres sur une utopie pastorale : bien lui en a pris. Outre le fait que, croisant la finesse des arrangements de Sufjan Stevens avec l'énergie lyrique d'Arcade Fire, le combo parvient à aérer la pop orchestrale, lui redonnant un lustre quasi-printanier, il a aussi une manière tout à fait singulière de composer : les morceaux semblent taillés dans la même étoffe, comme si au gré de longues séances d'improvisation, ils étaient parvenus à se détacher progressivement d'une même masse pétrie et travaillée par l'inspiration. Les enchaînements vont ainsi de soi, suivant le fil d'une rêverie commune sur laquelle viennent se greffer interventions vocales (voix masculine légèrement éraillée contre voix féminine gracile, un peu dans le genre Wayne Coyne versus Isobel Campbell) et ponctuations instrumentales (les pizzicati de violons, les notes de hautbois ou de basson), le tout porté par un souffle souverain. Certes, les refrains ressemblent parfois à des hymnes peu articulés (mais le chabadaba anglo-islandais a du charme), les récurrences jouent un peu contre la diversité de l'ensemble, mais le tout resplendit d'une beauté organique et frémissante que beaucoup d'amis islandais ou nord-américains pourraient aujourd'hui leur envier.(Popnews)
bisca
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le 28 mars 2022

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