Voici réédité l’un des plus fameux albums de Sun Ra, enregistré en 1979 sous le label Saturn à une poignée d’exemplaires, il est vite devenu rare et mythique. Il faut dire qu’il mérite cet engouement, Sun Ra s’est sans cesse renouvelé, avec une sorte d’entêtement, creusant rarement le même sillon et explorant tous les possibles, cet album-ci en est un parfait exemple…
Singulier…Oui cet album est singulier, par la forme d’abord, l’album est court et la seconde face …euh piégeante ! En effet, malgré que ce ne soit signalé nulle part sur l’album, elle est enregistrée en 45 tours et contient les onze minutes cinquante du morceau titre…
Pas moins de vingt-huit musiciens embarqués dans la mission, des instruments acoustiques, mais aussi leur équivalent électrique, basse, guitare, Rhodes. Les percussions sont bien entendu au premier plan avec cloches, battement des mains et même un ancien tambour Égyptien. Les voix sont là également, chœurs à l’unisson et présence magique de June Tyson.
La dominante musicale de l’album prolonge un axe entraperçu sur Lanquidity, nous sommes plongés, entre rêve et réalité, dans une atmosphère paisible et comateuse, sans doute une description sonore de cet univers cosmique en apesanteur, où les corps se libèrent de leur masse pour se fondre dans un monde ouateux et cotonneux, entre mort et naissance s’ouvrent les portes du cosmos, acide-pyramide, bon trip garanti !
Springtime Again constitue le premier étage de la navette, Luqman Ali prend les choses en main : le tempo figure une berceuse, tout est caresse, cymbales et claviers célestes, chœurs lointains, le printemps renaît. John Gilmore et Marshall Allen sont fabuleux, leurs solos, portés par la basse électrique et les chœurs, figurent à merveille l’éveil et la renaissance, comme une résurgence de la vie survenue des profondeurs inexplorées…
Door of the Cosmos obéit à une autre urgence, le tempo est plus rapide et vit aux rythmes mélangés de la guitare et des claquements de mains, le chant de June Tyson s’élève dans la tradition du gospel, peu à peu le rythme se complexifie emporté par la puissance de la basse, les solistes de l’Arkestra se succèdent, on remarque plus particulièrement Michael Ray très incisif à la trompette qui est ici à son meilleur, ça groove et ça balance…
Après une introduction aux claviers par Sun ra lui-même, Sleeping Beauty dévoile sa … beauté cachée en un long parcours funky balisé par les claviers omniprésents du Sun qui dessinent des espaces moelleux aux contours mouvants dans lesquels le vibraphone et les vents de l’Arkestra s’intercalent et réinventent un monde fait de quiétude et de paix.
Vraiment un maître-album, visionnaire et intemporel…