Quelques semaines seulement après la sortie de Before The Dawn Heads Us, Syd Matters talonne déjà son compatriote de M83, en vue de gagner le prix de l'intitulé le plus attentiste de l'année. Pourtant, c'est vers une certaine régularité que le groupe semble consacrer toute son attention, à l'image de la voix de son chanteur Jonathan Morali, dont le timbre voisine autant avec celui de Rufus Wainwright que celui de l'immense John Grant (The Czars), mais préfère gommer tous les excès qu'il permettrait en privilégiant un fil tenu. Refusant l'autodérision, Morali évite néanmoins la pose ou l'académisme grâce à une interaction assez constructive entre chaque membre de la formation, qui aboutit à une mouture plus incarnée de ce songwriting acoustique et patient, qui avait particulièrement séduit sur un premier album, A Whisper And A Sigh, paru en 2003. Cette musique, quoique introvertie et concentrée, gagne incontestablement à s'ouvrir au monde, comme en témoigne Watcher, l'un des morceaux les plus efficaces (et les plus convaincants) du disque. Même si les textes maintiennent une veine personnelle et mélancolique, c'est quand Syd Matters délaisse, en fin de parcours, "l'éplorement" façon Interpol unplugged pour se lâcher, en n'économisant ni l'usage des voix filtrées ou éthérées, ni les longues envolées instrumentales, entre L'Homme À Tête De Choux de Gainsbourg, The Virgin Suicides de Air et le Mogwai alangui de Happy Songs For Happy People, qu'il apparaît le plus à son affaire. La musique préoccupée de Syd Matters a déjà franchi l'étape du voyage en chambre. La suite devrait être décisive.
D'entrée, sur "City Talks", brève ballade d'ouverture, première d'une longue série, les notes de guitare, la voix légèrement enrouée ont quelque chose de doublement rassurant : oui, nous sommes bien dans l'univers cotonneux de Syd Matters, et oui, sa musique a mûri avec lui, plus ample, élargissant le spectre de son folk psyché et l'élevant plus haut, en surplomb des brumes ubaines, par-dessus les réverbères, là où les fils de l'intime (une écriture à la première personne) et du collectif (les clichés des "American Girls" désirées de loin et autres "Middle Class Men" restés enfants) se croisent inextricablement. D'un morceau à l'autre, le musicien varie les structures (de la ligne droite au zigzag) et les effets (cuivres, flûtes, percussions mélodiques, bidouillages électro, tous particulièrement dosés), se permet aussi quelques références discrètes (les retrouvailles des claviers de Air et de la voix de Beck sur "To All Of You", la composition en tiroir chère à Radiohead sur les particulièrement réussis "Someday Sometimes" ou "Watcher"), mais déjoue les pièges inhérents à ces choix : ni fourre-tout incohérent, ni exercice de style impersonnel, l'album surprend par sa tenue, sa cohérence et son originalité. A jouer toujours sur la même corde (de guitare) légèrement neurasthénique, à distiller l'équivoque et la tristesse ("I am a lost bird in a clear sky"), à balancer ses doux cocons mélodiques au vent de l'étrange (l'intro de "Passe Muraille", les arrangements un peu partout), le bonhomme finit par se frayer un chemin, par les nerfs, le sang et la peau, jusqu'à l'épicentre vital de l'auditeur. Touché. (Popnews)
Depuis deux ans, Syd Matters vit un peu un conte de fée. Celui du vilain petit canard de la musique indé qui réalise des chansons de plus de trois minutes trente, mélancoliques et pour couronner le tout… en anglais. Et pourtant ça marche, lauréat du concours CQFD des Inrockuptibles, l’album "A Whisper and a Sigh" obtient une reconnaissance du public et de la presse. Autant dire que ce deuxième album était plus qu’attendu.Et on peut tout de suite rassurer les fans de Jonathan Morali, celui-ci poursuit ses aventures musicales, là où elles s’étaient arrêtées, même s’il est désormais entouré d’un vrai groupe. On retrouve ainsi ce songwriting soigné et aérien si caractéristique qui se laisse porter par des arpèges de guitares tissant un soyeux univers.Des influences encore parfois perceptibles, notamment celle de Radiohead ou le clavier du pourtant parfait Someday Sometimes qui n’est pas sans rappeler celui du Piggies des Beatles… Cordes chaudes de Too All Of You, décadentes du Passe Muraille, sirènes ludiques et chanteur de Gorkys Zygotic Mynci sur I Care, le groupe multiplie les inventions pour parer d’or des chansons déjà bijoux de compositions.Vous l’aurez compris, on reste sans conteste sous le charme de "Someday we will foresee obstacles", Syd Matters arrivant à nous prendre dans ces filets avec les mêmes subtilités, mais avec tout simplement un peu plus d’expérience, car même le talent se travaille. Le vilain petit canard est bel et bien devenu cygne. (indiepoprock)
J'ai une relation particulière avec Jonathan Morali. Je ne le connais pas personellement, mais j'ai suivi son ascension depuis le début, et pour moi, ce type, que je croise à tous mes concerts, ne fait partie pas de la caste mystérieuse des rock-stars intouchables. . Non, Syd Matters est tout comme nous, un fan éperdu de musique, un garçon qui écoute, aime, puis fait son truc à lui avec les moyens du bord. Quand j'écoute ses disques, j'éprouve la même fierté qu'aurait un frère, car son succès, c'est un peu le nôtre aussi."A Whisper & A Sigh" a été un disque bouclé dans l'urgence, un rien bancal, mais terriblement attachant. Comme nous, Jonathan aimait Radiohead, Pink Floyd et Gorki's Zygotic Mynci, c'était net. Pour l'enregistrement de son petit second, Jonathan avait plus de jouets, plus d'espace et plus de temps. Je m'attendais donc à un album encore plus porté sur les sucreries synthétiques qui abondaient sur son prédécesseur. Mais "Someday We Will Foresee Obstacles" se révèle être un disque... folk. Jonathan n'a pas trahi, il est resté simple. Ici, ce sont les guitares qui prédominent sur le reste, et ce reste est souvent peu de choses. La voix de Syd n'a pas changé, douce et rauque, mais se dédouble parfois pour des effets plus que réussis (Obstacles), ose des pirouettes plus risquées (Someday Sometimes). Or, Jonathan a trouvé une chose qu'il ne connaissait pas: un groupe de scène et de studio. Même si ses compositions sont toujours le fruit d'un seul homme, "Someday We Will Foresee Obstacles" - remarquez le nous - est un album de groupe. Chacun apporte sa petite touche subtile et personnelle, du guitariste au batteur. Le résultat le plus évident de cette cohésion de ciment est "What Are You Looking At ?", hallucinante piste cachée en fin de disque, un trésor fantastique, aventureux, sans doute un des meilleurs titres de 2005. Jonathan n'est plus seul, et il s'en réjouit; Gorgy's fait des merveilles à la prod de même que Euro Childs aux choeurs.Bien que débordant d'idées (fugaces ou développées intelligemment), cet album ne révèlera pas ses secrets facilement. Jonathan, nous sommes fiers de toi! Tu nous a signé un chef d'oeuvre. (liability)