John Zorn – Spinoza (2022)
Au rayon « Archival Series » voici un nouvel album de John Zorn avec l’excellente formation « Simulacrum » dont c’est le dixième essai discographique sous la houlette du génial compositeur. Assez curieusement il ne me semble pas vous avoir parlé de cette formation, voici donc l’occasion de réparer cet oubli.
Simulacrum c’est un trio formé par John Medeski à l’orgue, au Fender Rhodes et au piano, Kenny Grohowski à la batterie et Matt Hollenberg à la guitare électrique. L’éventail embrassé par ces trois-là est extrêmement large, du jazz au métal irait assez bien, en ajoutant toutefois « sur le même album » ou encore « dans la même composition ». On le comprend, ici il y a des sauts anguleux, d’un genre à l’autre, soudainement et sans prévenir, tout à coup…
Justement il n’y a que deux longues pièces, et sur chacune un invité, et, le premier n’est pas un de ceux que l’on attendrait en pareille compagnie, ou dans une telle aventure. Pourtant il fit parti autrefois d’une autre formation « extrême » de John Zorn : « Naked City ».
Le gars en question c’est le doux Bill Frisell, pour l’occasion il s’est coiffé en brosse, bien planqué derrière des lunettes noires, s’est affublé d’un perfecto, d’un vieux jean et de bottes Western, c’est sûr, y’aura du larsen au kilo et ça va cramer d’l’ampli ! Ça c’est ce qu’on aurait aimé en fait, mais un autre plat a été servi, avec moins d’épices et un rond de serviette sans épine.
Du coup tout arrive mais par intermittence, pour le graal il faut attendre plutôt la fin de cette première pièce, le dernier tiers, mais honnêtement c’est tout de même très bon, avec la perfection habituelle dans la forme, la marque zornienne.
La seconde pièce c’est le morceau titre « Spinoza », se pourrait-il que l’hommage au philosophe du dix-septième siècle soit encore plus saignant, les espoirs sont grands à l’énoncé du nom de l’invité, Dieu le père au saxophone alto, John Zorn lui-même ! Bon là on est servi, du gros, du lourd, du comme on aime, ça couine, ça crache, ça déchire, y’en a qui se lâchent…
Les métalleux seront à la fête, sur le petit « obi » accompagnant le Cd, comme sur tous les albums Tzadik on peut lire « le trio d'orgue le plus extrême de tous les temps », ou encore John Zorn « a composé deux longs concertos », et surtout pour faire le lien avec le philosophe « une vision musicale aussi radicale que la philosophie de Spinoza lui-même ».
Ça résume assez bien, une musique assez hardcore sous la forme d’un concerto, avec des parties qui s’enchaînent, composées de styles et de rythmes différents, incorporant des phases violentes et jusqu'au-boutiste, mais aussi quelques plus rares moments calmes.
De quoi passer un bon moment aux côtés, sinon du philosophe, du moins de l’excellent John Zorn !