Une entreprise de destruction émotive, voilà comment il faut définir le deuxième album de Jonas Bonnetta (le premier sous l'alias Evening Hymns). C'est un gars sympa le Jonas, lui qui ne vous laisse que les six minutes inaugurales de Lanterns pour comprendre ce qui vous arrive. Si vous ne reprenez pas vos esprits passé ce délai, vous serez sans doute perdu à jamais. Perdu dans les méandres d'un folk cotonneux d'où émane une électricité incantatoire, foudroyante de justesse et de préciosité harmonique. Un univers détaché du temps où l'on côtoie un Dead Deer chargé d'émotions insaisissables, qui brame en compagnie d'hululements féminins terrifiant de sensualité. Comme si Bonnie ‘Prince’ Billy tirait à bout portant sur Matt Sweeney, laissant s’échapper le son des arpèges qui tourneboulent de I Gave You (Superwolf, 2005). Mtn. Song est fait de la même poudre sépulcrale et des mêmes vocalises désarmantes. Broken Rifle, cavalcade atmosphérique aux relents boisés en provenance de la cabane isolée de Bon Iver, est une balle perdue qui troue la peau du prêcheur s'égosillant sur l'autel de Tumultuous Sea, mère d'un orgue et d'une trompette funèbres se querellant au rythme d'handclaps syncopés. À mesure que l'alchimie agit, Cedarsimprovise des expérimentations enchevêtrées de voix doucereuses, annonçant la tempête (au sens propre) de November 1st 2008, Lakefield, Ontario. L'accalmie survient enfin avec ces History Books que Jonas entrouvrent pour déclamer à la manière de Phosphorescent, psalmodiant sa peine, le cœur en bandoulière et l'esprit entremêlés de cordes électrifiées. Passées les six minutes de Lanterns, donc, si vous ne parvenez pas à vous échapper, il ne vous restera plus que les yeux pour pleurer. Et c'est tout le bien qu'on vous souhaite. (magic)
Dans notre frénésie de classements en tous genres à chaque fin d’année, on en oublie de s’intéresser aux sorties tardives, surtout lorsqu’elles sont aussi confidentielles que le "Spirit Guides" de Evening Hymns. Derrière ce pseudo, se cache Jonas Bonnetta, un Canadien de 28 ans qui, l’air de rien, a réalisé l’un des meilleurs albums de folk mélancolique depuis le "For Emma Forever Ago" de Bon Iver.La comparaison avec Bon Iver est certainement flatteuse pour Bonnetta, son "Spirit Guides" n’atteignant pas les sommets d’émotion du bijou de Justin Vernon, mais on n’avait peut être pas entendu folk-songs aussi poignantes que Dead Deer, History Books ou Cedars (en hommage à son père décédé) depuis les déchirants cris du cœur de son homologue américain dans les bois du Wisconsin. Là où le folk mélancolique de Vernon se voulait essentiellement boisé, celui de Bonetta se veut plus orchestré avec notamment des cuivres qui font plus que de la figuration sur Lanterns ou Tumultuous Sea, accordéon et cordes sensibles sur Dead Deer ou encore synthé sur Broken Rifle. Il faut dire que pas moins de 17 de ses amis ont participé à l’enregistrement de cet album dont le batteur d’Ohbijou. A noter, pour finir, le surprenant November 1st 2008, Lakefield, Ontario sur lequel on n’entend pas de musique à proprement parler ou plutôt celle faite par un orage, avec le bruit de la pluie qui tombe pendant plus de 5 minutes. Calme et apaisant. (indiepoprock)