Au vu des récents événements, le titre Stars Of CCTV sonne de façon assez sinistre. La CCTV est en effet le système de vidéo-surveillance britannique, et l'on ne sait malheureusement que trop qui en ont été les dernières stars : les kamikazes du métro londonien. Quand Hard-Fi a enregistré la chanson qui donne son titre à l'album et le mini-Lp autoproduit dont la version augmentée arrive donc sur nos platines, il n'avait alors que la connotation bravache de petites frappes malines qui raillent le système: "We're the stars of CCTV, making movies on the street". Richard Archer, l'ancien leader des trop méconnus Contempo, et ses copains d'une lointaine banlieue pourrie dont la vacuité devrait faire partie de la légende s'ils accèdent à leurs désirs de succès, appartiennent à cette nouvelle génération de groupes de rock qui manie aussi bien le home-studio pourri que la guitare hyper nerveuse. Chez Hard-Fi, il faudrait ajouter un sens de la diatribe sociale par le gros bout de la lorgnette (Living For The Weekend) et des influences multiformes qui les promènent du ska à la pop en passant par toute la palette du punk malin, sans oublier l'essentiel potentiel dansable appris dans des soirées possiblement ecstasyées. En rajoutant une bonne dose de confiance, et surtout des morceaux qui fonctionnent parfaitement sur un équilibre d'intelligence négligente et de rage contrôlée (cette voix à l'arrogance prolo so british qui se risque parfois dans les hauteurs), Hard-Fi apparaît comme le groupe idéal de l'époque, ou tout au moins de la rentrée : punk, pop et dansant (Hard To Beat est carrément dancefloor). The Clash du XXIe siècle ? Pas impossible...(Magic)
Bienvenue sur CCTV, nébuleuse médiatique d’une Angleterre ressemblant chaque jour davantage à l’Oceania contée par George Orwell. Big Brother vous regarde. Les cours de la Bourse défilent sur le télécran. La Police de la Pensée vous surveille… Voici en quelques mots la prophétie émanant de ce premier album d’Hard-fi (espérons qu’elle ne devienne pas totalement réalité, même si elle l’est déjà partiellement…). Nouveau projet de Richard Archer (ex-frontman de Contempo), Hard-fi est aussi l’histoire non moins orwellienne de quatre jeunes issus de Staines (désert musical situé à quelques kilomètres de Londres), bien décidés à tromper l’ennui et à passer outre les dénégations premières des maisons de disque. Le résultat : un premier album diablement réussi et addictif, puisant autant dans le punk des Clash que dans la dance-music des Happy Mondays et de New Order. Mélodies imparables, guitares saturées, violons emphatiques (un peu trop peut-être…), soupçon de reverb dub et de melodica, jeu de batterie largement influencé par les breakbeats electro, tout est réuni pour embraser les charts et les dance-floors. Une bouffée d’air frais pour les weekenders du nouveau millénaire ! (indiepoprock)
De la naissance du punk aux ex-chômeurs de Kaiser Chiefs, on ne compte plus le nombre de formations dont la prophétique Albion a accouché en suivant ce schéma, comme si ses propres sujets étaient finalement les premiers à pâtir de sa légendaire perfidie. Mais là où leurs camarades de Leeds s’imposent comme la nouvelle nouvelle nouvelle (ad lib) référence du moment en arrosant les ondes de leurs refrains aussi entêtants qu’entraînants, Hard-Fi joue clairement la carte sombre et imprime en filigrane à tout ce premier album une sinistrose insidieuse subtilement diluée dans la réverb’ d’un dub anthracite, relevé ici et là d’une pointe de jaune vif ; tel un graffiti sur le mur d’une usine désaffectée. Premier single, Cash machine ouvre le bal de l’amer et donne le ton en racontant l’histoire d’un gars que le distributeur de billet refuse déjà de servir alors qu’il a touché sa dernière paye il y a pas une semaine. Encore trois semaines à tenir, plus d’unités sur son mobile, quelques contraventions et sa copine qui tombe enceinte, le pauvre gars en finit par se demander s’il ne bosse pas finalement que pour le compte du distributeur. Orwell dans l’ombre de Kafka.Le zapping continue, survole le conflit irakien (Middle-eastern holiday) vu à travers les yeux d’un jeune anglais musulman soudain désireux de prendre les armes, passe sur quelques histoires d’amour plus ou moins foireuses (Hard to beat, Better do better), s’attarde évidemment sur la condition de prolétaire (Living for the week-end et son jeu de mots à la sublime équivoque) et termine sur l’aliénation de l’homme moderne par l’omniprésence de la caméra (Stars of CCTV), jusque sur la pochette de l’album dont l’austérité rappelle fortement l’esthétique soviétique des années 80 (évoquée dans le titre). Une impression largement confirmée par le parti pris de la production qui lorgne très ostensiblement sur l’architecture sonore des 80’s, comme pour faire écho aux tubes synthé-pop qui foisonnaient du temps honni où la dame de Fer régnait sans partage sur l’île. En résulte une forte identité sonore, improbable mélange entre une pop électrique raclant l’asphalte réhaussée de sublimes arrangements piano/cordes et un dub urbain délicieusement intemporel (cet inénarrable mélodica...), exécuté dans une plainte rageuse ; de cette rage propre à ceux qui veulent désespérément s’extirper du prolétariat à la sueur de leurs guitares. Il suffit pour s’en convaincre d’écouter leur interprétation très personnelle du Seven nation army des Whites Stripes (face B du single Tied up too tight)... (pinkushion)