LA pop
Tout simplement l'un des plus grands albums pop de tous les temps... Et trois ans plus tard, ils récidiveront avec l'impeccable "From Langley Park to Memphis"...
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le 7 nov. 2012
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Je me souviens de quelques jouets de mon enfance : mon ballon de foot en mousse, mes Lego Star Wars et surtout ma motocross Action Man. Cette moto je l’emmenais partout. Bien en main, elle franchissait tous les obstacles et rebords de fenêtre de mon quartier. Puis, je la rangeais délicatement dans mon cartable. Aussi, à la maison, je fouillais dans la collection de vinyles de mes parents. Il y avait ceux que je connaissais déjà, ceux que l’on me chantait déjà peut-être avant d’avoir vu le jour. M’éloignant d’un traditionnel Paint It Black, d’un Hello Goodbye ou encore d’un Boys Don’t Cry, je me suis alors retrouvé avec Steve McQueen à la main. Je ne vous cache pas que ce choix fut plutôt motivé par la logique d’un gosse de sept ans, la moto sur la pochette avait eu raison de moi… Demandant alors à qui appartenait cette relique dont le temps et l’utilisation avaient laissé leur trace tant sur les bords de la pochette que sur les sillons, mon père se leva avec ce sourire, ce regard à la fois beau et triste. Peut-être était-ce là le souvenir d’avoir eu vingt ans en 1985…
La platine tourne, le diamant vient se poser délicatement sur le premier sillon. Je garde avec moi la pochette aux bords cornés, ne pouvant défaire mon regard de cette moto.
Le voyage commence par un coup d’œil sur la couverture de l’album. Paddy McAloon est alors assis sur sa Triumph (T100SS pour être précis), son regard est porté vers l’horizon, impatient d’emmener sa Wendy Smith vers l’aventure, vers une chevauchée fantastique : Bonny and Ride ? Neil Conti - le batteur - est accroupi, veste en cuir et col relevé comme Paddy, l’air d’un bad boy que le rock avait déjà trop vu. L’écoute m’éloignera de ce vilain préjugé, tout comme de celui m’ayant fait penser que le gentil garçon était au final Martin - bassiste et frère du chanteur (Paddy) - par sa tenue différente et son retrait à l’arrière-plan. Le morceau Appetite et sa ligne de basse bien marquée me prouvera le contraire.
Les premières écoutes furent difficiles, je me souviens avoir bon nombre de fois demandé à mes parents de passer la première piste : Faron Young. Je ne sais pas pourquoi mais je n’accrochais pas ce côté country-rock mêlé à la douceur du pop-rock britannique des années 80.
Puis, vient la deuxième piste, donc la première pour moi : Bonny. Peut-être le morceau le plus aboutit de l’album. Quelques notes brumeuses d’une guitare viennent au loin et arrive franchement une rythmique acoustique sur laquelle Paddy pose sa voix. Wendy l’accompagnera et se chargera du chœur. Guitares, claviers et batterie sont parfaitement posé.e.s dès le premier refrain. Quelle intensité ! Le lead de la guitare, la dernière cymbale et la voix arrière de Wendy enjolivent et intensifient l’amère tristesse de Paddy.
Appetite : le ton est donné avec ce synthé qui me paraît d’abord vieux jeu. Batterie, basse donnent le pas, un rythme soutenu et entrainant. Alors je comprends, la voix de Wendy se conjugue à perfection avec ce clavier à la reverb poussée. Cette profondeur va être tempérée par les bruits secs de la guitare, et par la batterie sur les refrains.
But I'm a simple slave of appetite
I'm a poor slave of appetite
On est parfois prisonniers de nos désirs, certains prennent le dessus et finissent par ternir une relation, par simple égoïsme. So, if you steal, be Robin Hood.
When Love Breaks Down : toujours ce même synthé putain, mais ici Wendy le surplombe merveilleusement. Une touche du clavier bien enfoncée, un souffle continu, quelques notes de basse qui viennent faire monter le désir d’entendre éclater le refrain. La guitare donnera pour celui-ci le départ, l’accompagnement et la finition.
Goodbye Lucille : ce riff introductif n’est pas sans me rappeler une influence funk ; c’est normal me direz-vous, l’album date de 1985, année marquant l’achèvement du funk outre-Atlantique. La rythmique est toutefois ralentie et ajustée aux besoins de la sophisti-pop anglaise.
Le premier refrain nous joue un tour, il s’éteint délicatement. Le deuxième est le bon, mon cœur s’emballe d’avoir patienté.
La jeune plume de Paddy fait méditer : Life’s not complete until your heart missed a beat .
Et cette guitare saturée sur le dernier « Johnny Johnny oooooh », un sentiment bittersweet vous échappe et vous frappe en plein cœur.
Hallelujah : non je ne me suis pas trompé, il y a bien quelques influences funk dans cette seconde partie de l’album. Pour moi, le meilleur morceau mettant en avant le couple Wendy-Paddy, mais surtout Wendy elle-même.
Moving the River : au-delà d’une rythmique bien funky sur le refrain, qui m’a également rappelé Johnny Marr (The Smiths), j’admire et je me délecte de la plume de Paddy. Quelle maturité…
Horsin’ Around : une ballade pop, comme à cheval. Le refrain et la dernière minute se font au galop.
Desire As :
Le pendant d’Appetite ? Plus calme que le dernier, mais sans doute plus triste. Ici, c’est plutôt la fille qui brise un cœur. Desire as a sylph figured creature who changes her mind.
Selon les légendes germaniques (et wikipédia surtout) : “les sylphes prennent souvent une forme humaine pour approcher les Hommes et se faire aimer d'eux. Mais les gracieuses sylphides ne supportent pas les grossièretés, ni les mauvaises manières, si bien que si l'être humain avec qui elles vivent devient grossier, elles le quittent tout de suite.”
Sylphe vient du latin sylphus, signifiant génie. Génie comme celui de Paddy sûrement.
Blueberry Pies : And Dugan, who cheated in class, guess what he's doing now?
He's a priest. La vie est ainsi bien faite…
When The Angels : un orgue qui me rappelle la messe du dimanche dont j’avais horreur gamin. Toutefois, le rythme et la mélodie deviennent vite entrainant. C’est pas si mal la messe avec tonton Paddy non ?
This Yearning Loins : que ça fait vieux jeu ces mélodies ! j’adore le vieux jeu, dans 20-30 ans il n’y en aura plus...
He’ll have to go :
Whisper to me, tell me, do you love me true
Or is he holding you the way I do?
Though love is blind, make up your mind I have got to know.
Le diamant parvient au dernier sillon et le bras de la platine revient à sa position originale.
Pourquoi cet album alors ?
Il occupe pour moi une place importante aujourd’hui. J’ai un peu grandi avec, mais ce n’est que maintenant, alors âgé d’une petite vingtaine qu’il prend un nouveau sens. Cette critique est à la fois celle du gosse qui a découvert Prefab et celle du gars d’aujourd’hui, qui garde le vinyle sur son étagère à côté de ses bouquins de fac. D’une certaine manière je comprends le sourire qu’avait eu mon père lorsque je lui ai mis ce vinyle sous les yeux.
Puis, l’impression que chaque écoute est toujours meilleure que la précédente, que mes émotions sont à chaque fois chamboulées et qu’il me restera toujours difficile de dissocier les regrets des remords…
Prefab Sprout et cet album figurent parmi les groupes les plus sous-cotés de son temps. Encore aujourd’hui leur influence peut s’entendre dans la pop anglaise, par la mélodie et par les arrangements. Merci Thomas Dolby.
P.s. : la version remasterisée de 2007 avec ses titres acoustiques a sans doute pour beaucoup d’amateurs de Prefab Sprout offert une seconde jeunesse, une nouvelle occasion d’avoir vingt ans l’espace d’un instant. Pour ma part, je me suis revu avec ma moto à la main dans mon vieux salon…
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Créée
le 20 juin 2018
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