Comme si 2016 n'avait pas été assez lamentable, il a fallu que la fin d'année se solde par le départ de VEKTOR de trois membres sur quatre, laissant ce pauvre David Disanto seul à la barre. Même si ce dernier s'est tout de suite empressé d'assurer que le groupe allait continuer, difficile de ne pas voir dans cet événement autre chose qu'une saignée artistique. Ce sont en effet trois musiciens remarquables qui s'en vont, notamment Blake Anderson qui est particulièrement ahurissant à la batterie. S'il est compliqué d'entrevoir les raisons de ce départ, il semble que la longue gestation (5 ans) de cet album paroxysmique a dû en fatiguer plus d'un. Car on a vraiment l'impression qu'avec "Terminal Redux", les membres de VEKTOR se sont surpassés à plusieurs niveaux.
Pourtant, j'ai été dubitatif lors de ma première écoute. L'album est ainsi difficile à digérer en raison de sa longueur, de sa densité technique et peut-être de morceaux moins accrocheurs. J'ai même été déçu par l'occurrence de structures riffesque similaires entre plusieurs chansons (hormis le duo "Charging-Recharging The Void" où c'est volontaire) ou par un certain manque de solos de gratte. Mais en persévérant, l'album est petit à petit monté en moi et vers la 5ème écoute j'étais conquis.
"Terminal Redux" est finalement une baffe monumentale. Il y aurait beaucoup de choses à dire sur cet album, comme cette sorte de solennité impériale qui monte sur "Cygnus Terminal", l'intro et le break bluffants de "LCD (Liquid Crystal Disease)" ou encore ce solo de basse sur "Psychotropia". Les mecs de VEKTOR paraissent en osmose, ce qui semble propice à l'éclosion des potentialités de chacun. Je pense ici à Frank Chin qui se met davantage en valeur mais surtout à Blake Anderson dont le jeu de batterie atteint des sommets.
Mais s'il y a bien une chose à retenir de cet album, c'est son trio de fin. "Pillars of Sand" déboule sans prévenir après quelques secondes d'arpèges cristallins. De cette composition furieuse se dégage un immense sentiment de tragédie. En écoutant ce titre, j'imagine une galaxie déchirée par une guerre intersidérale où des nébuleuses d'énergies mortelles laissées par des armes cosmiques se reflètent dans les yeux en larmes de milliards d'êtres. C'est beau et terrifiant à la fois.
Et puis l'acoustique céleste de "Collapse" s'empare de nous, la voix claire surprend mais apaise, la mélancolie des mélodies touche au sublime, avant que la machine thrash ne s'emballe, créant ce sentiment de chute inexorable auquel le titre de la composition fait écho. Cette "ballade" est une superbe réussite, démontrant avec brio que VEKTOR sait aussi émouvoir dans la douceur.
Conclusion de l'album, "Recharging The Void" s'impose facilement comme un des meilleurs titres Metal de ces dernières années. Un voyage spatial sans commune mesure : c'est agressif, épique, original, et même victorieux. A noter cette délicieuse accalmie toute en choeurs "soul" qui n'est pas sans évoquer "The Great Gig In The Sky" de vous-savez-qui. Ce passage, c'est un peu s'émerveiller une dernière fois dans la contemplation des étoiles avant de franchir un grand saut vers l'inconnu. Mémorable.
Pour les raisons que j'ai évoquées plus haut, « Terminal Redux » n'est pas intouchable, souffrant de quelques défauts qui rappellent que les membres de VEKTOR sont humains. Mais tout cela est insignifiant vis-à-vis du bonheur que cette œuvre a pu me procurer.
Dans sa fureur créatrice, VEKTOR renouvelle plus que jamais le Thrash Metal.