Un mélange déroutant de comptines pour enfants et d’envolées lyriques, la rencontre insolite de rythmes hip-hopet d’orchestrations folk excentriques : sur leur troisième album, la recette des sœurs Casady, autrement dit Coco Rosie, n’a guère évolué. Tout juste leur palette orchestrale s’est-elle étoffée. Les raisons, il est vrai, ne manquent pas d’être profondément irrité par le duo-d’Américaines-d’origine-indienne-préféré-de-la-branchitude-parisienne : des « björkeries » vocales ou sonores en pagaille, une pub pour Kenzo, trop de chansons uniformes caractérisées avant tout par leur absence de mélodie, une appartenance à la galaxie mystico-folklo et néo-bab éclose dans le sillage de Devendra Banhart et, surtout, une propension à imposer, outre leur sens esthétique très particulier, des copains danseurs, poètes ou performeurs à qui on jetterait des pierres même au off du off d’Avignon. Voilà pour le verre à moitié vide. Mais avec Coco Rosie, il serait dommage de ne pas se concentrer sur le verre à moitié plein : la voix divine de la harpiste Sierra (Rosie), apprentie cantatrice aux talents multiples, parfait contrepoint aux litanies nasillardes de sa sœur percussionniste Bianca (Coco) et la savoureuse utilisation d’instruments hétéroclites (jouets d’enfants, notamment) pour tisser un univers musical féerique assez unique qui refuse le monde adulte. Lorsque nos deux inséparables – qui ne se connaissent vraiment que depuis quatre ans, les vies de leurs parents les ayant séparées – se retrouvent soudées, comme unies dans leur différence, réinventant ensemble la petite enfance commune qu’elles n’ont pas eue, le charme et la magie opèrent pleinement. Malgré les textes prétendument plus explicites qu’à l’accoutumée de ces « Aventures de Cheval fantôme et de Mort-né», le mystère de leur propos reste toujours aussi complet. Qu’importe. Sur l’entêtante ritournelle Japan, l’aérien Rainbowarriors ou le délicatement tortueux Raphael, on suit, émerveillé, Sierra et Bianca dans leur monde naïf et spontané, onirique et asexué. Hugo Cassavetti
On a cru un peu trop vite que la nouvelle génération de songwriters américains que la critique, un poil paresseuse, a cru bon de classer sous le label nu-folk , perpétuait gentiment la grande tradition des musiques populaires américaines ? blues, folk ou country. Avec le patchwork de Cripple Crow et les chansons hors format de Ys, Devendra Banhart et Joanna Newsom ont respectivement démontré qu'ils caressaient pourtant de tout autres ambitions. Sur ce point précis, le troisième album de CocoRosie agit aussi comme un puissant révélateur. Dans La Maison de mon rêve et Noah's Ark, Bianca et Sierra Casady avaient dessiné les contours d'un petit intérieur musical aménagé avec une grande délicatesse. Cette esthétique volontairement confinée faisait tout le charme de leur entreprise ; elle en traçait aussi les limites. La chaumine de CocoRosie était accueillante et douillette, mais la conversation des maîtresses de maison, puisant pour l'essentiel dans le vocabulaire ordinaire de la lo-fi, manquait un peu de sel et de piment. Avec The Adventures of Ghosthorse and Stillborn, les sœurs Casady abattent sans façon les cloisons qui bornaient leur inspiration. Après avoir joué les fées du logis, elles posent désormais fièrement en fées délogées et dérangées, embrassant avec gourmandise un champ musical où se confondent ? comme dans un rêve enfiévré ? beats électroniques, envolées atmosphériques et vocalises classiques. Passant de la gouaille grinçante du hip-hop à la pure majesté du chant lyrique, ce disque, traversé par quelques présences amies (Banhart, Spleen, Antony), est aussi un hymne vibrant à la voix, envisagée ici dans l'infinie grandeur de ses pouvoirs expressifs. Débridé et pas franchement raisonnable, The Adventures? devrait s'attirer quelques commentaires hystériques ? on entend déjà les uns criant au génie, les autres hurlant à l'imposture. Il donne pourtant envie de porter un regard plus serein et réfléchi sur la musique enfin mature et mutante de CocoRosie. (Inrocks)
Après avoir trompé leur monde avec le chimérique La Maison De Mon Rêve (2004) et cessé de l'intéresser avec Noah's Ark (2005), les deux soeurs Bianca et Sierra Casady sont de retour avec un album dont le seul nom fatigue d'avance, The Adventures Of Ghosthorse And Stillborn. Entre hip hop lounge et déballage usuel de gadgets ces bâtons de pluie achetés en solde chez Nature & Découvertes, tout de même servant à dissimuler une formidable inaptitude à écrire la moindre chanson, ces douze titres en forme de sacerdoce ne font qu'enfoncer le clou planté par leur précédent Lp. Voix éreintantes (entre le chant principal, les envolées lyriques de Sierra et la chorale de Gremlins de Japan, on ne sait plus trop à qui décerner la palme), niaiserie omniprésente et remplissage forcené sont le lot de cette nouvelle livraison que la police des oreilles, si seulement elle existait, aurait sans doute jugé bon de laisser en quarantaine pour éviter une épidémie mondiale d'urticaire. Et l'on a beau espérer se raviser avant la fin, même l'apparition discrète d'Antony Hegarty sur le morceau final n'y fera rien : le Miracle espéré n'aura pas lieu. (Magic)
Déjà un nouvel album pour les frangines Casady, qui ont fait du chemin depuis "La maison de mon rêve" en 2004. Désormais nouvelles coqueluches d'une pop arty et aventureuse, à l'image de Björk il n'y a pas si longtemps, le duo est forcément attendu au tournant. Évidemment, passé l'effet de découverte des premiers jours, l'enthousiasme s'émousse. Mais, si la formule a égaré avec le temps son pouvoir de surprise, elle n'en a pas perdu ses prérogatives. En délaissant d'abord en début d'album leur pop éthérée pour un hip-hop nonchalant au petit goût de Mike Skinner aka The Streets, pour poursuivre ensuite sur des titres plus lyriques, et revenir en fin d'album sur leur sillon, CocoRosie réussit à découvrir de nouvelles pépites. En creusant la veine et en tamisant plus gros, le filon reste exploitable. Bien sûr, ceux que la voix éraillée de Bianca énerve ne changeront pas d'avis, mais il faut reconnaître au groupe sa personnalité qui, après trois albums, qui plus est enchaînés rapidement, assure sa particularité. Le chant des possibles est vaste pour les soeurs et leur permet sur "The Adventures of Ghosthorse and Stillborn" de sortir du cocon enfantin dans lequel on a bien voulu un temps les enfermer. La maison de leurs rêves qu'elles n'ont de cesse de construire est loin d'être un château pour poupées roses et blondes. Elle a plutôt la taille d'un continent imaginaire et les couleurs d'une ghost town perdue dans un grand canyon que traversent les deux filles Casady complètement à l'ouest. (Popnews)
Lorsque "La maison de mon rêve" était sorti en 2004 on s'était enthousiasmé pour le folk bricolo-onirique des soeurs Casady, mais on pouvait aussi se demander comment donner suite à ce petit ovni que personne n'attendait. Avec Noah's ark, Coco Rosie avait répondu de belle manière en gardant les mêmes éléments en y ajoutant une touche de profondeur supplémentaire dans l'écriture. Pourtant, à la sortie de ce troisième album, on ne peut s'empêcher de se demander à nouveau si elles seront capables de renouveler leur musique. Sur ce troisième album, Coco Rosie garde ce côté onirique et nostalgique, qui rappelle l'enfance. On retrouve aussi Antony, le temps d'une discrète apparition sur Miracle. Des éléments qui nous placent en terrain connu, qui assurent une continuité de l'univers de Coco Rosie. Mais sur Rainbowarriors, on notera l'utilisation de beats électro, sur Promise, la dynamique est très proche du hip-hop, à d'autres moments, ce sont des passages de musique lyrique qui font leur apparition : c'est parfois réussi (Houses), c'est d'autres fois plus pompier, comme sur Japan, titre ou le côté "enfantin" est de plus un peu exagéré. Ce sont les titres les plus simples sur le plan de l'instrumentation, comme Raphael, Werewolf, ou encore Animals avec des boucles de piano, qui laissent la part belle au chant et à la musicalité à deux voix de Coco Rosie qui restent les plus convaincants, et assoient définitivement l'habileté d'écriture. Bien sûr l'album prête le flanc aux critiques qui se focaliseront sur le côté naïf ou agaçant de certains aspects. Mais l'essentiel n'est pas là, car Coco Rosie se retrouve aujourd'hui dépositaire d'une véritable identité sans pour autant céder au sur-place ou à l'éphémère qu'on aurait pu leur prédire. (indiepoprock)
Dans la musique, il y a plusieurs façons de faire… Vous avez des virtuoses comme Joe Satriani qui vous noient sous une marée de technicité et 15000 notes à la minute, vous avez des mastodontes comme Pink Floyd dont les concerts sonnent quasiment en 5.1 grâce à des moyens techniques et financiers gargantuesques, vous avez des illuminés comme Rammstein qui ne craignent aucune démesure avec des shows pyrotechniques à faire pleurer ce “biiiiiiiiiiip” de De Villiers et son Puy Du Fou. Et vous avez aussi quelques freaks comme The Velvet Underground qui en font le moins possible pour un maximum d’effet.Cocorosie ferait plutôt partie de cette dernière catégorie. En deux albums, les soeurs Cassidy ont montré tout ce qu’il était possible de faire avec des jouets d’enfants, un joli brin de voix et beaucoup d’imagination. Si vous êtes passés à côté de la musique de ces deux américaines jusqu’à présent, imaginez Bjork reprenant à sa sauce du Syd Barrett pour illustrer un film de Michel Gondry, et vous ne serez pas très loin de la vérité. Un cocktail assez iconoclaste qui aura vite séduit tout le public néo-hippie des Devendra Banhart ou Antony And The Johnsons. Mais il faut bien dire qu’il semblait compliqué de décliner cette formule sur un troisième album sans finir par lasser un peu l’auditeur exigent… Les deux frangines ont d’ailleurs dû se dire peu ou prou la même chose puisqu’elles ont sensiblement changé la donne pour ce nouvel opus.Est-ce l’influence de leurs amis français, le rappeur protéiforme Spleen et le beatboxer Tez (tous deux présents sur l’album), qui les a menées sur cette voie? Toujours est-il que “The Adventures Of Ghosthorse & Stillborn” a une assise rythmique bien plus solide que par le passé. Le disque est par conséquent moins flottant que ses deux prédécesseurs, mais les petites protégées du label Touch&Go parviennent néanmoins à conserver la fraîcheur enfantine qui a fait leur succès. Leur folktronica lo-fi accueille donc désormais quelques beats hip hop ici ou là, forçant Sierra et Bianca à adapter leur chant en conséquence, pour un résultat étrangement enthousiasmant (”Rainbowarriors”, “Promise”, “Animals”…), tandis que les ritournelles prennent des airs soudainement plus primesautiers (”Japan”). Que les fans masochistes de la première heure se rassurent, il y a toujours quelques balades vénéneuses sur lesquelles se morfondre avec délice (”Miracle”, “Sunshine”, “Raphael”…)Ce troisième album devrait logiquement élargir l’auditoire du duo sans pour autant choisir la facilité de la redite. Fortement conseillé donc, sauf peut-être aux fans indécrottables de Satriani.. (mowno)