Touche pas à mon despote !
J'ouvrais péniblement les yeux aux sons d'applaudissements frénétiques et mécaniques. J'étais assis au milieu d'un public bigarré, béat d'admiration devant ce qui se passait devant lui. Les...
le 3 mars 2016
244 j'aime
42
Nous voilà à nouveau face à face Mon bon Muddy.
Mais là c'est pas pareil.
C'est pas le soir tard, la démarche titubante, rentrant d'un quelconque bar louche.
Un rade qui refuse de servir de la limonade, qui prend son pied à te servir des shots de Whisky aussi brûlants que le feu de l'enfer.
Pas ces fins de soirées borgnes où le bouton play s'enclenche comme par miracle, crachant ta voix chaude et réconfortante accompagnant cet alcool qui se ballade dans mes veines.
Ta musique comme le shoot d'héroïne bouillant qui s'insinue lentement, que tu sens prendre possession des moindres recoins de ton corps, qui donne l'hyper-sensibilité à tes sens.
Non c'est différent aujourd'hui mon bon Muddy.
Aujourd'hui, t'as cent ans mon ami (4 avril 1915).
cent ans que t'as ouvert tes petits yeux dans le trou du cul du Sud Américain: Rolling Fork, Mississippi.
C'est ta grand mère qui va s'occuper de ton petit cul noir quand ta mère va casser sa pipe alors que t'as à peine quatre ans.
Elle est pas facile ta vie, hein Mc Kinley ?
Alors pour passer le temps, pour meubler ton enfance, tu joues de l'harmonica. Tu tritures ton joujou en fer, tu souffles dedans, tu pleures dedans.
En grandissant, c'est la six-cordes que tu étreins, que tu serres comme les jeunes filles en fleurs qui rôde autour des plantations.
Tu ne la lâches plus cette gratte Mc Kinley.
Dès que t'as cinq minutes, dès que tu descends de ton tracteur, tu files jouer avec tes potes.
Tu te fais la main, tu imites tes idoles (Robert Johnson, Son House...) que tu files admirer quand ils passent dans la région.
Tu l'as trouvé ta voie. La plantation Stovall, les heures passées le cul sur ton tracteur, c'est terminé pour toi.
Tu te jettes sur ta guitare, tu la travailles comme l'humble ouvrier que tu es.
Tu bosses tes accords, les mineurs quand c'est pas tout rose dans ta vie, quand les emmerdes pleuvent partout autour de toi. Les majeurs quand l'espoir renaît, quand tu "...Woke up this morning..." du bon pied.
Tu expérimentes le bottleneck avec ces bouteilles de bières vides qui jonchent la terre des juke joints poussiéreux où tu fais tes armes.
Elle est tracée ta voie Mc Kinley.
D'ailleurs c'en est terminé de Mc Kinley Morganfield. Fini. Ce sera Muddy Waters dorénavant.
Ce sera le surnom que ta grand mère adorée te donnait quand tu rentrais crade comme un peigne, boueux comme un cochon, de tes virées enfantines.
En 1941, Alan Lomax l'ethnomusicologue, le producteur, le collecteur fou des musiques nouvelles ou perdues de l'Amérique Profonde, alors à la recherche de Robert Johnson (qui avait pris ses quartiers chez Satan depuis trois ans) te fit enregistrer pour la première fois dans la plantation pour la Bibliothèque du Congrès.
Et c'est en 1943 que tu fais tes adieux au Sud. Que le vent tourne et qu'il souffle vers le Nord. Direction Chicago.
La suite mon pote, elle est connue.
Chicago, Chess Records, les enregistrements, la galère, Howling Wolf ton meilleur ennemi, les copains et les femmes.
C'est à Chicago que tu inventa l'électricité. Que tu planta la graine qui allait donner le Rock'n'Roll. C'est ce Rock'n'Roll, ce Rejeton énervé, cette musique de blanc qui va t'évincer petit à petit du devant de la scène.
Mais c'est ce Rock'n'Roll respectueux, ce Rock qui a ouvert les yeux, qui a traversé l'Atlantique, ces jeunots à cheveux longs qui veulent te voir.
Ces gamins qui t'ont même piqué un titre de chanson pour le nom de leur groupe et qui te respectent comme leur propre père.
Elle est achevée ta mission Muddy. Tu es, tu restes la source à laquelle le Rock'n'Roll vient s'abreuver quand il est perd son énergie, sa créativité.
Tu es l'Alpha et l'Oméga.
Ouais Muddy, c'est pas un jour comme un autre. T'as un siècle l'ami !
Un siècle et t'as jamais été aussi jeune.
Un siècle et tu bandes encore.
Un siècle que t'es classique, un siècle que t'es dépassé et que t'as jamais été aussi moderne.
Pour tout ce que tu m'as donné durant toutes ces années, gracieusement, comme si j'étais un membre de ta famille.
Pour ta voix comme un phare dans la nuit, comme une présence discrète mais essentielle dans ma vie.
Pour tout ça Muddy et bien d'autres encore, je me devais de te souhaiter un excellent centenaire l'ami.
J't'embrasse l'Ancêtre.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes ♪♫...ZBN 2 . La bafouille Pop-Rock !...♫♪.............et Punk !..et Blues !..et Métal !..et Rap !..et Bossa ! et Criptyques Musicales
Créée
le 6 avr. 2015
Critique lue 628 fois
35 j'aime
10 commentaires
Du même critique
J'ouvrais péniblement les yeux aux sons d'applaudissements frénétiques et mécaniques. J'étais assis au milieu d'un public bigarré, béat d'admiration devant ce qui se passait devant lui. Les...
le 3 mars 2016
244 j'aime
42
12:30. Brenda se lève difficilement après une nuit arrosé avec ses amis dans une boîte à la mode de Miami. A ses côtés Jenifer, Steven et Brandon ronfle paisiblement sur les coussins multicolores...
le 28 mai 2015
227 j'aime
30
Colorado. État de l'Ouest des États-Unis. Capitale: Denver. Une superficie de 269 837 km2 pour plus de 5 millions d'habitants. Des vallées gigantesques d'un côté, les montagnes rocheuses de l'autre...
le 28 déc. 2015
200 j'aime
16