John Zorn/Bill Laswell – The Cleansing (2022)
Un album sorti en janvier, qui marque la rencontre entre deux qui se fréquentent, se connaissent et s’apprécient. Zorn et Laswell, un peu comme deux montagnes qui se rencontrent, sur Tzadik bien sûr…
L’album paraît dans la « Spectrum Series », à l’obi blanc. Cette dernière marque l’entrée du label dans sa troisième décennie et se consacre à la crème des improvisateurs, le nec plus ultra. Le premier volume est consacré à Wadada Leo Smith, George Lewis et John Zorn, le second à Sylvie Courvoisier, on y trouve Cyro Baptista, Ikue Mori, Brian Marsella et beaucoup d’autres encore, celui-ci est le trente-septième volume de la série et il fera date.
La pochette est ornée par une sorte de « mandala » circulaire contenant en son centre l’aleph, première lettre de l’alphabet hébraïque, la lettre qui a engendré toutes les autres, on dit d’elle qu’elle est la « ténébreuse », la « muette », la seule qui dialogue avec le divin.
Autant le dire tout de suite, l’album ne déçoit pas et même se situe dans le haut du pavé, lors de son enregistrement nous étions tous en plein confinement, et John Zorn n’avait pas touché son instrument, le saxophone alto, depuis plus de quinze mois. C’est essentiellement un compositeur, c’est vrai, mais tous ses admirateurs savent quel instrumentiste il est. Sans doute cette rupture dura-t-elle très longtemps, mais les retrouvailles, entre l’interprète et son outil, n’en sont que plus extraordinaires, et, il faut bien le reconnaître, carrément exceptionnelles !
On sait que les deux musiciens se fréquentent depuis Painkiller, et qu’ils se sont rencontrés ici ou là, le temps d’un projet, puis d’un autre... Pour Bill le confinement consiste à faire le tour de son appartement dans tous les sens, c’est dire si l’appel de Zorn est libérateur et arrive à point nommé, créer, revivre et jouer à nouveau.
Bill Laswell tient la basse et les deux créent simultanément, en improvisant, du début à la fin. Ça s’est déroulé le neuf avril deux mille vingt et un, en un jet, enregistré et mixé, du travail vite fait et bien fait, comme si tout cela attendait, et ne demandait qu’à jaillir, comme une source longtemps restée souterraine et aspirant à naître au jour, enfin.
Les six pièces sont sœurs et s’enchaînent facilement, l’une naissant de l’autre, comme un même flux descendant son cours. Des écrivains célèbres, ayant parfois touchés à l’occultisme, prêtent leurs noms aux titres de l’album, Brion Gysin, Aleister Crowley, Austin Osman Spare, William Burroughs et Alejandro Jodorowsky.
Un album essentiel qui restera de toute évidence parmi les meilleures sorties 2022 !