Un album en duo par Arjen Anthony Lucassen (Ayreon, Star One...) et Anneke van Giersbergen (The Gathering), faut bien comprendre que sur mon échelle personnelle des projets qui vendent du rêve (qui va de 2 à 76), on était pas loin de 75,9.
Le concept de l'album coule de source venant des deux néerlandais : il se passe à l'âge d'or hollandais, le temps béni des colonies, le XVIe siècle. Un marin part sur un navire pour l'Inde et l'album nous retrace ses échanges épistolaires avec sa femme restée à Amsterdam. La petite originalité, c'est que l'album est découpé en deux CDs qui contiennent chacun les mêmes chansons, seulement l'un est Gentle, acoustique et folk, l'autre est Storm, épique et metal.
Il faut d'abord saluer l'extraordinaire attention accordée au concept : le récit est extrêmement documenté, les artworks sont soignés, le livret de paroles est accompagné de compléments approfondissant le contexte historique et même d'une carte retraçant le périple du marin vers les Indes. L'histoire se voulant réaliste en est moins palpitante mais reste assez touchante avec des personnages très vivants.
L'intérêt principal restant la musique, Lucassen a-t-il bien fait de nous refaire le coup du Dr Jekyll & Mr Hyde, en nous séparant ses deux styles ? On se souvient à quel point ça avait été dommageable à The Dream Sequencer et Flight of the Migrator qui nous faisaient déjà une entourloupe similaire.
Il faut avouer que, dans l'ensemble, ça va : les deux versions sont plutôt agréables à écouter et l'ensemble est plutôt homogène, l'intérêt supplémentaire est de montrer tout le talent de composition de Lucassen et celui d'interprétation de Giersbergen tant parfois les deux versions de la même chanson contiennent leur lot de bonnes idées.
On notera surtout l'abandon total des claviers (d'habitude si prisés par Lucassen) qui sont remplacés par une cinquantaine d'instruments folk sur la version Gentle et par des orchestrations et chœurs sur la version Storm. Les ambiances de l'Amsterdam moyenâgeuse, de l'Inde exotique ou encore des terribles tempêtes se retrouvent parfaitement dans ces arrangements musicaux. Il faut aussi saluer la performance d'Anneke, qui livre de belles paroles mais surtout des interprétations toujours exquises et variées de sa voix qu'on ne présente plus.
Cependant la conséquence est de placer l'auditeur dans une situation délicate : quel disque écouter, le Gentle ou le Storm ? Ou les deux ? Le problème étant que les deux étant intéressants, je me les passe à la suite, mais ça reste les mêmes chansons, ce qui a vous en conviendrez un côté lassant. D'un autre côté n'écouter qu'un seul disque reste trop réducteur.
Je suis quand-même relativement déçu par cet album par rapport à ce que j'avais pu en espérer, il manque globalement d'un ou deux morceaux plus punchy qui pourraient briser un peu la (relative) monotonie de l'océan. Mieux encore, je pense que Lucassen aurait dû ne faire qu'un seul CD réunissant toutes les influences sur un temps plus court et donc plus digeste... Mais The Diary reste une collaboration entre les deux hollandais les plus admirables que je connaisse, et donc un album qui se révèle d'une grande qualité pourvu qu'on se donne la peine de s'attarder sur tous les détails qu'il renferme !