La patrouille des éléphants
CLUTCH. Sous ce nom anodin et pas franchement classe se cache l'une des pépites rock de ce nouveau millénaire. Bien que le groupe existe depuis maintenant vingt ans, c'est en 1998 avec l'album Elephant Riders que cette bande de rednecks commence à se faire un nom - notamment en signant sur le label Columbia Records - et se détache de ses influences musicales pour dénicher une formule magique qui se donne pour devise : faut que ça groove.
Nourris au punk-hardcore de Washington, friands de hip-hop - surtout son chanteur, qui se cherche entre chant mélodique growlé et flow - les gars de Clutch sont avant tout des amateurs de musique touche-à-tout et pas un énième groupe de hard-rock nostalgique des 70's. On trouve chez eux la lourdeur du stoner le plus direct, les riffs bluesy bien gras qui fleurent bon le hard-rock de papa (ZZ Top et Black Sabbath en tête), et de la pédale wah-wah un peu partout. Ce son généreux, à la fois technique et funky, heavy et dansant ("Ship of Gold"), fait leur marque de fabrique. Neil Fallon apporte un soin particulier au songwriting, ce qui explique peut-être l'absence de gros refrains fédérateurs. Clutch est un groupe qui s'étale finalement peu en gros tubes, prenant un soin particulier pour rebondir constamment et ne jamais se reposer sur le traditionnel modèle couplet/refrain. C'est aussi ce qui fait sa qualité sur la durée.
Homogène - mais poussant son concept jusqu'au bout -, Elephant Riders marque un tournant, le groupe délaissant peu à peu le son brut de leurs débuts (l'album éponyme et ses relents de hardcore), pour s'adonner à un rock plus fun et toujours plus groovy, qui pose les bases de leur ligne de conduite pour les albums à venir. Pour le peu qu'on soit amateur de riffs bluesy, c'est le genre de disque jouissif que l'on ressort inlassablement et qui ne perd jamais sa saveur.