Quelques jours avant Noël, on demandait son coup de coeur discographique de l’année à l’écrivain anglais Nick Hornby. Connu pour son érudition musicale, l’auteur de High Fidelity répondait en citant The Head And The Heart. Nul n’avait alors entendu parler de cette formation américaine au nom qui évoque autant le ciboulot que les gambettes. Quelques recherches plus tard, le groupe se dévoilait un peu. Originaire de Seattle, The Head And The Heart a sorti un premier album autoproduit l’an passé, avant d’être repéré par l’historique label Sub Pop. “On s’est retrouvés en une du Seattle Times”, explique Charity Thielen, chanteuse et violoniste francophile du groupe – elle a fréquenté les bancs de Sciences-Po Paris. “Le titre de l’article disait : ‘Le prochain gros groupe de Seattle ?’ On n’en croyait pas nos yeux. On a ensuite été contactés par le label Sub Pop. On a réarrangé l’album, qui ressort aujourd’hui.” Tout s’est passé vite pour la petite troupe. Le groupe se forme il y a à peine un an et demi, lors d’une soirée open-mic bien arrosée d’un bar de la ville. Ses six membres viennent d’un peu partout aux Etats-Unis, mais tous partagent un amour pour le folk de Crosby, Stills, Nash & Young et des Fleet Foxes, pour la pop de Wilco et des Beatles. “Nous accordons tous la même importance aux mélodies. Je pense qu’on a vécu à Seattle une espèce de gueule de bois du mouvement grunge. On a eu envie de choses plus jolies, plus soignées. Ceci étant, le côté un peu déprimant de la ville reste un plus pour les artistes : il y pleut beaucoup, il n’y a pas la tentation d’aller à la plage comme en Californie. Alors on va à la cave, pour composer.”Fini les cheveux gras, au diable les chemises de bûcherons : les popsongs de The Head And The Heart dévoilent une facette plus heureuse de Seattle. Bien peignées, elles sont surtout savamment chantées (Coeur d’Alene, Ghosts) – trois des membres du groupes se partagent le micro et les harmonies. Souvent, ces morceaux à choeurs évoquent d’hypothétiques travaux d’Arcade Fire, mais des membres d’Arcade Fire qui auraient décidé de privilégier l’acoustique et de préférer aux hymnes de stades les ambiances feutrées et les soirées devant la cheminée. “On aime Arcade Fire, bien sûr, mais pas seulement… On a des péchés mignons aussi, on aime bien Toto.” Pire encore qu’un plaisir coupable, The Head and the Heart est le titre d’un morceau du chanteur de variété irlandais Chris de Burgh, auteur de la dégoulinante Lady in Red. “On s’en est aperçu en tapant notre nom dans Google… La honte. Il ne faut surtout pas l’écrire, hein ?” Et puis quoi encore : ça va pas la tête (et le coeur) ?(inrocks)