-The Nubians Of Plutonia (Saturn Research LP406) - 1969
• Alto Saxophone,Flute – Marshall Allen
• Baritone Saxophone – Pat Patrick
• Baritone Saxophone – Charles Davis
• Percussion – Robert Barry
• Trombone – Nate Pryor
• Alto Saxophone – James Spaulding
• Trumpet – Lucious Randolph
• Timbali – Jim Herndon
• Electronic Piano – Sun Ra
• Trumpet – Phil Corhan
• Tenor Saxophone, Bass Clarinet – John Gilmore
A-
Plutonian Nights 4:20
The Golden Lady 7:40
Star Time 4:15
B-
Nubia 8:13
Africa 5:04
Watusa 2:35
Aiethopia 7:11
Enregistré entre cinquante-huit et cinquante-neuf, c’est l’un des derniers enregistrements de Sun Ra avant le déménagement vers New-York, où l’Arkestra s'installera dans l'East Village de Manhattan, mettant fin à « la période de Chicago ». Cet album va clore de façon mémorable ce qui restera non seulement une marque géographique mais également un style particulier de l’Arkestra, une façon de jouer, entre le be bop et la musique stellaire qui déjà se dessine. Cette période, faite de multiples petites avancées stylistiques recèle plein de petits trésors finement ciselés, comme sur cet album-ci, sans doute l’un des plus beaux. Cet album aura deux vies, une première, un peu cachée et secrète, faite de ventes par les membres de l’Arkestra à la fin des concerts. Une autre, éclatante, entretenant la légende, après une réédition par Impulse en 1974.
« Plutonian Nights » commence par un thème répétitif au piano, bien vite le son de baryton s’ajoute et sa sonorité colorise le thème de façon exquise. John Gilmore joue un solo bien ciselé, soutenu par un rythme carré, joyeux et tribale. Le thème réexposé est entraînant, le rythme sautillant est irrésistible… La marche commence…
Le titre « The Golden Lady » se nommait à l’origine « « Lady with the golden stockings », c’était également le nom de l’album à l’origine. Ce n’est qu’en 1969 qu’il sera renommé « The Nubians Of Plutonia » plus explicite et en accord un peu plus intime avec la musique jouée. Ici, le rythme, répétitif et entêtant, nous renvoie à l’Afrique, James Spaulding à l’alto, puis Marshall Allen à la flûte, explorent cette « jungle » qui n’est pas sans nous évoquer le Duke, tandis que le rythme se complexifie insidieusement, puis c’est Lucius Randolph qui explore ces contrées, les percussions de Robert Barry et Jim Herndon évoquent les rythmes anciens, à la fois vecteurs de transe et de communication. Lors de ses concerts Sun Ra aimera marcher accompagné par cette musique, vêtu en pharaon et porté par le son des percussions.
« Start Time » ! Levez-vous, c’est l’heure de partir ! Oyez oyez ! Ecoutez le Grand Orchestre de Sun Ra qui mieux que personne, sait rejouer ces airs be bop surgis du passé. La culture musicale de Sun Ra est immense, il a traversé nombre de périodes musicales au cours de sa vie, et la musique a été toujours le centre de son existence… Il envoie, comme ça, un arrangement tel qu’il a pu, autrefois, en concocter pour Fletcher Henderson, lorsqu’il jouait à ses côtés, trépident, joyeux et festif !
« Nubia », située dans cette Afrique de l’Est à laquelle Sun Ra a voué une grande admiration pour son passé si prestigieux, entre le Soudan et L’Egypte du Sud… L’évocation est vive, foisonnante et luxuriante. Le piano électronique de Sun Ra butine au rythme des percussions, les tambours improvisent des rythmes surgis d’un passé qui évoque la grandeur et la beauté des réalisations du peuple noir, ainsi que la magnificence d’une histoire mythique et grandiose. On entend même, en duo avec la basse, des sons de cloches nigériennes agités par John Gilmore. Encore une superbe évocation riche en rythme et en couleurs, pleine de mystère et d’inventivité.
Avec « Africa » nous poursuivons la visite de cette glorieuse Afrique, tambours et percussions nous emmènent en une longue marche vers la redécouverte des valeurs passées, source de cette philosophie qui se prolonge vers le cosmos et l’universel, en une harmonie parfaite. La procession avance, les chants nous accompagnent, Marshall Allen nous envoûte au son de sa flûte, puis le rythme soudainement s’accélère, voilà, ça y est, nous y sommes…
« Watusa » est martial, joyeux, virevoltant et victorieux. Ce morceau respire la joie et l’allégresse, on le réentendra souvent lors des performances « live » de l’orchestre, il marque un aboutissement et possède la force d’un hit au royaume du Sun… Eclatant !
« Aiethopia » évoque une imposante et majestueuse marche processionnelle. A nouveau une grande richesse rythmique, foisonnante, pour accompagner et symboliser un long cheminement, peut-être initiatique, plusieurs fois proposé tout au long de cet album. Il symbolise avec force, au travers d’un passé mythique, la longue marche du peuple noir, toujours soumis à la ségrégation et au racisme… à New-York, Sun Ra côtoiera les Black Panthers !
S’il n’en faut qu’un, pourquoi pas celui-ci ?
Ecrit en 2012