Une place dans ton cœur pour le show de leurs vies

Oui , c'est le cas de le dire, il revienne pour trouver une place dans notre cœur. Quand je dis qu'il revienne c'est pour souligner la meilleure compilation live de Caravan à la BBC . Si vous n'avez qu'un seul album à avoir de ce groupe en concert c'est bien ce double . La version de “ Vierge sur le bord du ridicule” en est le meilleur exemple . Enregistrée pour John Peel en 74, elle dépasse la version légèrement trop symphonique (mais excellente) de Caravan and The New Symphonia . La finale avec le superbe solo de David Sinclair à l'orgue en témoigne. La version de “ For Richard” est aussi la plus belle jamais endisquée. L'ouverture avec le violon de l'autodidacte Geoffrey Richardson est sublime et Richard Sinclair chante vraiment comme s'il donnait le show de sa vie. Toute cette session pour John Peel est tout simplement sublime.
Ils font même une chanson de Kevin Ayers jouée originellement par le Soft Machine 1. C'est peut-être d'ailleurs étonnamment le seul point faible et daté de l'album. Les explorations “Soft Machiniennes ” qui s'étirent pouvaient être intéressantes en concert à l'époque, mais sur le CD 50 ans plus tard elles perdent de leur magie. Par contre tout concert des années 70 a besoin d'une dose de chaos et ici le fastidieux solo de drum est évité tout au long de l'album. Et cette exploration dans l'univers de Soft Machine reste un attrait et une curiosité, ne serait-ce que pour savoir si Richard Sinclair à la voix arrive à tirer les marrons du feu ? Et il s'en tire merveilleusement bien, il n'a rien à envier à personne du Canterbury.
Je pourrais parler longtemps de ce concert de leurs vies, après tout on ne donne qu'une fois ce concert. Il suffit d'écouter le concert du Bataclan en 75 pour être convaincu que Caravan ne se relèverait jamais de cette période faste 68-75 et que tout concert subséquent ne serait que séquelles de ce concert amalgamé, imaginaire mais parfait. 75 étant la dernière année où le groupe brilla de tous ses feux. Ici le Dab song concerto est meilleur que la version studio originale. Moins rock, plus feutré, il gagne du gallon et permet à Caravan de révéler tout le potentiel de cette chanson un peu trop sur-produite par Tony Visconti à l'origine et on arrive à oublier la voix de Richard Sinclair , qui vers la fin du morceau, essaie de se faire passer pour un chanteur de heavy-rock. Le band est sauvé de cet écart de conduite par le violon ensorcelé de Geoffrey et la finale jazzy et délicate à souhait. Même Caravan ne peut échapper à Caravan ici

Caravan aura probablement rêvé tout au long de son existence de donner un tel 3 heures de musique. Il s'est fait plaisir et nous l'a donné dans cette compilation comme une vierge sur le bord de l'orgasme qui donnerait son corps pour la première fois! Croyez moi il n'y a rien de ridicule dans cette vierge douce et folle ! Et si nos oreilles sont depuis longtemps habituées au pays rose et gris de Caravan , ici elles redeviennent pucelles tant tout y est frais, inspiré voire nouveau pour le groupe par moments, et finalement elles sont ensorcelées.
On n'en finit plus d'écouter le concert de leurs vies ! Celui-ci nous rappelle à quel point Caravan trône parmi les dix meilleurs groupes de la scène progressive anglaise!