Touche pas à mon despote !
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Jeunelap déboule dans l’egotrip avec un flow incandescent et les yeux plein de larmes. Un Rap insaisissable, entre coup de soleil et coup de Blues, fou rire et bagarre. Un gamin qui prend le Rap game pour ce qu’il est : une putain de cour de récré
On le sait depuis maintenant pas mal d’années, le Rap Français, malgré une production beaucoup trop abondante, est riche et pluriel. Du Rap auto-tuné, bas du front et aussi complexe qu’une addition de CP estampillé JuL, un “J” trempant sa plume de pigeon dans sa propre fiente et crachant ses bredouillements incompréhensibles dans un flow anorexique. Jusqu’au grand Oxmo Puccino ciselant ses textes comme l’orfèvre le diamant brut, collaborant aussi bien avec les plus grands noms du Rap made in France, qu’avec, par exemple, le trompettiste Jazz Ibrahim Maalouf et son orchestre classique d’une trentaine de musiciens pour une splendide relecture du roman de Lewis Carroll, Alice aux pays des merveilles. Les nombreux styles du Peuh-ra Français se mêlent, s’entremêlent, s’entrechoquent au fil de fusions plus ou moins judicieuses, d’associations plus ou moins fructueuses. Une gamme de choix aussi large et rutilante que le cul des bihatchs qui se trémoussent dans ces mêmes clips de Rap. Du Rap conscient à l’égotrip, du Gangsta Rap au Rap Commercial et jusqu’au Rap Alternatif, le néophyte a de quoi faire son choix dans cet éventail de styles, toujours plus nombreux, et de talents, toujours moins nombreux.
Alors quand dans la quantité de skeud Rap qui déferle chaque semaine dans les bacs et qui finiront comme épouvantails à oiseaux sur le cerisier du voisin, il se trouve qu’il y en a un qui t’attrape par l’oreille, tu te dois d’en parler et d’en faire profiter les copains.
C’est en parfait autodidacte et en pure dilettante - pour l’instant tout du moins - que le Bordelais Jeunelap s’est lancé dans l’aventure Hip-Hop. Malgré son jeune âge, Enzo a bourlingué, de Bordeaux à Bali, de Paname au Cap d’Agde, il promène sa belle gueule et son mégot de bédo sous les différents horizons que le destin lui fout sous les pieds. Si l’homme aime balader son ombre sous les différents soleils de l’Hexagone et d’ailleurs, ce sont les nuages qui semblent suivre le jeune homme, comme une malédiction à la con qui t’empêcherait de bronzer en plein soleil. Un spleen qui lui colle à la peau, qu’il tente d’exorciser en le crachant dans un flow nerveux et élastique. Une prosodie qu’il mâchouille avec négligence, se plaisant, dans une facilité déconcertante, à désarticuler son flow, le rendant tour à tour flexible et désinvolte sur la splendide Double L ou hyperactif aux fulgurances rythmiques qu’il se plaît à déconstruire avec l’aisance du vieux briscard comme sur le très beau En ce Moment. C’est l’urgence qui semble dicter la conduite du skeud, l’urgence d’un flow débridé, un flow qui roule les cheveux au vent en pleine décontraction. Malgré cette apparente nonchalance que Jeunelap se plaît à mettre en scène, la production se veut léchée et assez complexe pour un premier projet “DIY”. Un sound design volontairement criard, outrancier. Des effets qui bouffent l’espace sonore, qui ajoutent cette couleur criarde aux titres, colorant à l'extrême les sentiments. Toujours trop brillant et souvent bien trop sombre. Un soleil beaucoup trop jaune pour être honnête et une nuit trop noire pour être réelle.
Un premier album comme une bouée jetée à la mer. Le projet d’un passionné qui se jette dans le Rap comme on se jette dans le Punk, comme on roule sur l’autoroute à 3 grammes, tête la première, sans ceinture de sécurité et le bédo aux lèvres. Un coup de pistolet à l’aveugle qui vise en plein coeur de la cible. Alors coup de chance ou talent inné ?
Comme dit le proverbe “La chance est un talent”, et du talent Jeunelap n’en manque pas.
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Créée
le 12 nov. 2024
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