Vortex - 1975-1979 (2003) - La compile
Vortex c’est d’abord l’histoire d’une fratrie, les frères « Vivante », le plus jeune, Jean-Pierre âgé de seize ans, est lycéen à Lyon. Il côtoie quelques amis avec lesquels il fonde un groupe, il y a Jean-François Trouillet qui joue de la flûte et François Gérald qui est batteur, est présent également un guitariste, le frère de Gérard, mais il ne fait que passer dans cette histoire. Ceux-là s’intéressent à Hendrix, bien sûr, à cette époque qui ne s’intéressait au génial guitariste? mais ils aiment également Soft Machine qui projette une grande influence sur leur jeu, d’ailleurs ils reprennent le répertoire de la formation.
Arrive enfin Jacques Vivante, étudiant ingénieur et frère de Jean-Pierre, souvent à Paris, il pratique la guitare, tout ce petit monde se rencontre et s’essaie à la composition à l’intérieur du groupe « Urantia », ce nom est issu d'un livre un peu ésotérique qui porte ce titre, mi-bible, mi livre philosophique. Puis c’est le grand choc, un truc terrible qui les marquera à jamais, un soir d’été, à Saint-Cyprien, ils assistent à un concert de Magma ! La connexion entre l’univers du petit groupe et celui de Magma s’impose lorsque Vander récite un passage tiré d’Urantia, la boucle est bouclée, ils ne s’en remettront pas !
Le groupe s’étoffe autour des deux frères et de François Gérald, un saxophoniste se présente, Gérard Jolivet, Jeff Trouillet est toujours là, il joue de la flûte et des percussions. Ils sont donc cinq et décident de s’appeler désormais "Vortex". Nous sommes en soixante-quinze, le groupe doit jouer au festival d’Avignon, ils décident alors de faire un album, après s’être préparé très sérieusement lors d’innombrables répétitions.
L’album sort à mille exemplaires avec des défauts assez conséquents liés à des problèmes de masterisation. Enfin si vous en possédez un, vous avez là une belle pièce de collection ! Pour ce qui me concerne je possède le double Cd de la compile du groupe, avec les deux albums augmentés de quatre titres bonus, c’est aujourd'hui ce qu’on peut trouver de plus complet à propos de ce groupe mythique.
Le titre d’ouverture est l’excellent « Haroun’ Thasckouack », un clin d’œil au vulcanologue Haroun Tazieff, la pièce est très belle, on y entend une musique qui balance dans la sphère « jazz-rock » et même un peu prog, assez dans la lignée des musiques d’alors qui foisonnaient entre nos oreilles. C’est Jacques qui tient la basse et Jean-Pierre est au piano Fender, les deux solistes sont tout à fait excellents, Gérard au saxo et Jeff à la flûte suffisent à donner cette couleur jazz qui fait tant plaisir.
L’album original contient quatre titres, le second s’appelle « Ahsquoumboum », dont le nom provient d’une "private joke" appartenant au groupe. Après le tourbillonnant « Haroun’ Thasckouack » qui donne le tourni, cette seconde compo est à la fois plus théâtrale et plus libre, elle possède des airs d’Orient et semble très composée, non sans rappeler un peu Magma avec ses « faux départs ».
« Délicieuse créature » qui enchaîne est la plus longue pièce ici, presque un quart d’heure au compteur, elle correspond au début de la face B. Pas de baisse de régime, ici l’atmosphère se fait parfois un peu mystérieuse et le titre possède quelques moments calmes qui servent de point de départ au lancement orbital de la machine, et ça fonctionne plutôt bien.
Le Cd contient deux titres bonus d’égale qualité, « C’est Cool, Raoul » et « Prolégo 1 » qui assurent parfaitement, ils offrent une valeur particulière à cette édition tant ils sont réussis. Il faut également saluer l’excellente qualité du son, cette fois-ci, ainsi que du livret intérieur très complet et qui nous plonge dans les détails de la vie du groupe, que j’ai tenté de résumer un peu ci-dessus.
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Vortex – Les Cycles De Thanatos (1979)
Le second album de Vortex est d’une autre trempe, plus complexe, préparé, avec de nouveaux entrants, sans doute plus prog également, tout en conservant ses influences premières dont il ne se départira pas. C’est également le dernier album de la formation qui ne donnera pas suite. On retrouve les deux frères Vivante à leur poste, Jacques à la guitare basse et Jean-Pierre au piano, Fender et orgue Yamaha.
Le batteur François Gérald quitte le groupe et est remplacé par Jean-Michel Belaich, après des auditions. Jean-François Trouillet quitte également le navire, un poly-instrumentiste, Christian Boissel est recruté, il joue des claviers, du hautbois et du cor anglais, il possède une solide formation de musicien. Le début de l’enregistrement des « Cycles de Thanatos » commence en juillet soixante-dix-sept.
Les conditions sont telles, et la musique si complexe, qu’il faudra bannir toute forme d’impro et écrire au fur et à mesure, quitte à regretter un manque de spontanéité et tomber dans une certaine froideur. La moitié de l’album est bouclée en un mois et demi. La première pièce, « God is good for you, John » n’est pas dédiée à Coltrane mais à John… Mclaughlin ! Nous sommes en pleine période jazz/rock et l’accent est souvent mis sur la virtuosité.
« Hipopotalamus Negrus » est également composé et se retrouve ici sur les bonus du second Cd. Dans le même temps le groupe donne des concerts et côtoie l’ARFI, « les « Cycles de Tatanos » se rôdent progressivement, la pièce sur l’album dépasse les vingt-cinq minutes.
Alain Chaléard et Maurice Sonjon jouent des percussions, du xylophone, du vibraphone des timbales et des cloches, ils se joignent au groupe, ainsi que le saxophoniste Jacques Guyot et Gérard Jolivet, qui joue de la clarinette basse et du sax également. Des invités occasionnels jouent aussi sur l’album, Michel Boissel au basson et Sunny James au violon.
On cite généralement cet album comme étant la référence principale du groupe, ça peut s’entendre, mais perso je lui trouve une certaine grandiloquence et un côté très écrit, un peu froid. Pour autant on ne s’y ennuie jamais car il possède un côté labyrinthique assez unique qui lui donne un grand intérêt.
Mais pour un gars simple comme moi, le premier essai « Vortex », frais et léger est celui que je préfère…