Pharoah Sanders – Welcome To Love (1991)
Pour situer clairement l’album il suffit de lire le sous-titre de la pochette : « Pharoah Sanders Plays Beautiful Ballads ». En effet nous voici confrontés à soixante-dix minutes de ballades qui s’enchaînent. A sa façon, Pharoah s’inscrit pieusement dans les pas de John Coltrane, qui avait sorti, en mille neuf cent soixante-trois, le fameux « Ballads », sur Impulse, avec son célèbre quartet.
Je dois reconnaître, qu’avec « John Coltrane And Johnny Hartman », ce sont les deux albums que j’ai le moins écoutés de sa période des années soixante. Il est également intéressant de constater que Pharoah ouvre avec « You Don’t Know What Love Is » qui figure également sur le « Ballads » de son illustre prédécesseur, une façon de mettre son pas dans celui du géant.
On se souvient également d’Archie Shepp, grand interprète des standards qui a également sorti, en soixante-dix-sept, un album dans cette veine, « Ballads For Trane », ainsi que « Black Ballads » en quatre-vingt-douze, mais pour tout dire, les ballades débordent dans son répertoire, il faut dire qu’il les interprète comme personne, avec un cœur « gros comme ça ».
Remarquons cependant qu’en ce qui concerne Pharoah, c’est un peu à contre-emploi, disons qu’on ne l’attend pas sur ce créneau, lui tant aimé quand il bouge et vocifère, grand dévoreur d’énergie, de grelots et de clochettes, de percus, de chants tribaux et de danses occultes. Mais il y a une heure pour tout, même pour ce qui se tient dans le registre du sentimental, ma foi, profitons !
Avec ce répertoire ancien et ces classiques souvent nés à Broadway, dans des comédies musicales à l’eau de rose, Pharoah se souvient de ses débuts de saxophoniste, lors de sa formation. Il y a plein de nostalgie ici, ainsi que de bons sentiments qui débordent, les interprétations sont vraiment parfaites, avec une réelle ferveur, sans le moindre recul, ni de pas de côté. Et c’est très bien ainsi.
L’enregistrement s’est déroulé au Studio Gimmick, à Yerres, en France, pendant trois jours, au milieu du mois de juillet mille neuf cent quatre-vingt-dix. Pharoah joue du ténor mais aussi du soprano, il est accompagné par William Henderson au piano, Stafford James à la basse et Eccleston W. Wainwright à la batterie.
Il est à noter que selon les éditions les pièces sont différentes, ainsi, sur celle que j’écoute, chez Timeless Records, « Moonlight In Vermont » ne figure pas, mais il y a « Soul Eyes » de Mal Waldron, « Lament » et « The Bird Song » de Pharoah, en solo pendant près de sept minutes, un plaisir rare et précieux.