J'ai souvent croisé le nom de Tetsu Inoue depuis une vingtaine d'années, mais n'ai jamais fait la démarche d'écouter un de ses albums, c'est finalement un de mes éclaireurs, Ouigfio, bien connu pour ses goûts pointus en matière de musique Ambiant, qui me pousse, sans le savoir, à creuser un peu le sillon. Et comme sur Spotify il n'y a que 2 albums de disponibles, mon choix se fait sur celui qui a la plus belle pochette : "Yolo".
Je l'écoute d'abord allongé dans mon lit et m'endors paisiblement à la moitié de l'album. Au réveil, je me l'écoute une seconde fois en faisant la vaisselle et là, une fois arrivé à la moitié du disque (le temps qu'il m'a finalement fallu pour faire la vaisselle), je me dis : "Ouhlà ! C'est quoi ce disque ?" ... je me réécoute le premier morceau au casque, tout en faisant des recherches sur le net, et hop, déclic, une texture simple d'apparence, mais finalement aussi complexe que la matière que nous propose Brian Eno.
Je décide donc de rédiger une critique tout en écoutant le disque, cela faisait longtemps (6 mois) que je ne m'étais plus plié à l'exercice des "Réactions à Chaud".
Hop, c'est parti !
On commence par un glitch, des sons répétitifs, progressivement de plus en plus envahissants et dérangeants, tout en étant harmonieux à mes oreilles (j'adore la musique expérimentale, ça aide). Des cassures sonores, comme un disque CD qui saute, des scories sonores, le tout agrémenté de sons que ne renierait pas Brian Eno, sauf qu'ici c'est moins harmonieux dans l'ensemble à cause de ces sons parasites ... il se démarque donc d'emblée de son influence. Le morceau n'arrête pas de se mouvoir, j'ai l'impression d'un aquarium dans lequel s'est faufilé un serpent de manière gracieuse.
Le second morceau démarre avec des sons indistincts, magma sonore sombre où l'aspect techno des glitchs a de nouveau son importance, le tout submergé par une masse sonore onirique et ambiante, calmante ... le tout est agrémenté par des sons venant d'un autre espace ... de nouveau une sensation aquatique, mais ici agrandie à un océan sonore où se meuvent des poissons rapides à visage humain.
Le morceau d'après démarre de nouveau avec une belle intro glitch, apparemment la signature de l'album, une profondeur sonore me rappelant les ambiances de l'album "On Land" de Brian Eno. On flotte au ras du sol, en avance rapide au dessus d'un désert immense. Cette musique, décidément, provoque pleins d'images en moi.
Glitch, que dis-tu ? On poursuit dans la même veine, mais avec une musique de plus en plus complexe, une respiration lointaine mais omniprésente, un souffle, de l'eau, des sons se percutant en boucle, comme une étendue aquatique percutée par quelques gouttes d'eau formant des ondes à sa surface. Il a appelé son morceau "Curve", oui, je veux bien voir une surface aquatique courbe.
On ne change pas une formule qui fonctionne, l'aspect technologique se mélange aux sonorités harmoniques, et, toujours le fantôme de Brian Eno qui plane. Tiens, le morceau s'appelle "O Shape", ce qui peut vouloir dire "O Fantôme", coïncidence ?
Au final, mon impression se résume à cela : Brian Eno + glitch = Yolo. Et ce n'est pas péjoratif, c'est vraiment un plus qu'apporte Tetsu Inoue. Il provoque des images oniriques en permanence. La fin de l'album étant de moins en moins envahi par ces sonorités perturbatrices et plongeant de plus en plus vers un abîme sonore où vous retrouverez des poissons étranges, espèces méconnues, peut-être millénaires, peut-être en voie de disparition, nul ne sait ...
C'est assez étonnant, ce que j'ai ressenti et écrit spontanément, partant d'un aquarium, pour aller vers des étendues, pour finalement plonger dans les ténèbres aquatiques.
Maintenant, dans cet espace atypique, je décide de profiter pleinement de ce qui m'est offert ... je serais donc silencieux à propos des trois derniers morceaux.