En compagnie de Guillaume Bianco, Lewis Trondheim s’était lancé un défi : réaliser un dessin par jour, publié sur Instagram, qui formerait une longue histoire. Et le tout, sans paroles. Un an après, le tout est regroupé en un ouvrage, « Les herbes folles ». Techniquement, ce livre est le deuxième tome de la série « Les nouvelles aventures de Lapinot » même s’il n’a pas grand-chose à voir avec le premier. Ce n’est pas l’art du dialogue dont Trondheim est si friand qui est mis à l’honneur ici… Le tout est publié à L’Association.
Je n’ai pas eu vent d’une éventuelle sortie du recueil de Guillaume Bianco. Je vous invite à découvrir son histoire sur Instragram. Ses aquarelles sont magnifiques : https://www.instagram.com/guillaumebianco/
Lapinot se ballade dans la ville. Tout va bien jusqu’à ce que les herbes et les plantes envahissent tout. En quelques pages, le voilà perdu dans une ville en ruine, envahi par la végétation. Et seul… Il va errer et chercher à revenir dans son monde. Surtout que le monde végétal est rempli de monstres en tous genres…
Comme je suis Lewis Trondheim sur Instagram, j’avais pu suivre dès le démarrage des « Herbes folles » l’histoire. Cependant, il m’a été impossible de la suivre sur le long terme. Il suffit de quelques jours de déconnexion (ou que l’image soit noyée au milieu d’autres comptes que l’on suit) pour perdre le fil. Cependant, ce format de publication, page par page, amène un suspense réel. Que va-t-il se passer ? Et quand Lapinot se retrouve en danger, on attend le lendemain avec impatience. Cette publication jour par jour n’est pas sans rappeler celle de « Bludzee », initialement publié pour les téléphones portables.
Au cours des 365 pages, le rythme est assez lent. Trondheim découpe ses pages comme autant de cases. Sans texte, l’action est décomposée. Avec cet aspect « action », couplé à la partie improvisation, il y a quelques redondances et l’ouvrage n’est pas toujours très clair (notamment sur la partie monde parallèle, où l’on sent l’auteur en difficulté pour l’expliquer dans texte) et parfois redondant. Cependant, c’est un vrai plaisir de retrouver le Trondheim innovant qui tente de choses. Même si ce n’est pas parfait, avec les contraintes imposées, cela reste un tour de force. Évidemment, pour s’en sortir, l’auteur nous ressort Richard pour seconder Lapinot. Ce sont les seuls personnages de la galaxie Lapinot que l’on verra, l’ouvrage fantastique lorgnant plus du côté de « Ralph Azham » ou « Donjon ».
Au niveau du dessin, le travail de mise en scène de Trondheim est assez remarquable. Non seulement ses paysages de ruines sont très réussis, mais les cadrages sont variés, dynamiques et inventifs. On regrettera juste le rendu des aquarelles à l’impression, très saturées, comparées aux photos sur Instagram. Pour le coup, ça ne rend pas honneur au travail de l’artiste.
« Les herbes folles », projet expérimental plein de contraintes, est une réussite. Même s’il possède forcément les défauts de sa conception, il se lit avec plaisir. Trondheim a d’ores et déjà commencé un nouveau projet estampillé « Lapinot » sur Instagram en publiant… des strips. Visiblement, l’auteur n’a pas fini de jouer avec son médium et c’est tant mieux.