Sing yesterday for me, c'est l'histoire d'un manga dont j'ai attendu la réimpression des tomes durant quatre ans dans l'espoir de pouvoir les acheter à prix humain. Néanmoins, ni mes quatre années d'attente, ni l'adaptation de l'anime qui lui aura procuré un gain de popularité substantiel n'auront motivé l'éditeur à procéder à ladite réimpression. Il est certain qu'elle verra le jour à un moment donné, mais j'ai fini par perdre patience et franchir le pas en anglais.


Sing Yesterday for me, c'est l'histoire d'un dénommé Rikuo Uozumi qui vient de terminer ses études supérieures. Quelques mois après, notre quidam se trouve un petit boulot qui lui permet de vivre correctement. Ce dernier n'étant pas motivé à amorcer une vie sociale active afin de ne pas subir le stress du monde du travail japonais, décide de continuer ainsi... avant de rencontrer une jeune fille atypique ainsi que la fille dont il était amoureux à l'université qui chalbouleront son quotidien.


The one who wants to live differently to society must also make the effort to put himself into question


À partir d'ici, à base de ces quelques lignes et de cet extrait, ou du premier chapitre, il est déjà possible de comprendre que le manga tend à traiter certaines thématiques qui ne sont pas très courantes dans le média à condition d'y prêter attention, voire de procéder à une analyse, ce que, comme d'ordinaire, je ferai ci-dessous en les suppléant.


Sing Yesterday for me se distingue donc dès le début des autres mangas de romance car il est plus proche de notre réalité quant aux relations des personnages principaux: les personnages ont besoin de réfléchir, ils rompent, disent qu'ils préfèrent rester ami...


tel que le moment où c'est ce qui est dit à Uozumi par Shinako dans les vingt premiers chapitres.


Et c'est en cela que les relations nous paraissent crédibles, réalistes, car nous ne sommes pas dans une relation typique d'un manga de romance classique, mais dans un manga qui propose des comportements plus similaires aux nôtres.


L'autre particularité du manga, toujours d'un point de vue relationnel, est que les liaisons des personnages principaux trouvent pour l'écrasante majorité d'entre eux leurs racines dans un cadre temporel différent d'ordinaire. En effet, lors de la lecture de nombre de mangas de ce genre, le lecteur remarque que les personnages ne se connaissent pas dès le début: ils se rencontrent à un moment donné et font connaissance par la suite; on parlera donc de relations nouvelles. Dans le cas de Sing Yesterday for me, c'est l'exact opposé qui se produit: les personnages se connaissent déjà et sont liés par le passé; on parlera donc de relations antérieures. Par exemple, c'est le cas de Uozumi qui connaît Shinako depuis la fac, de même pour Chika qu'il connaît depuis cette époque; il en va de même pour Hayakawa qui connaît Shinako depuis l'enfance et Minato sui connaît Haru depuis le lycée... Aussi, le développement des personnages, la situation dans laquelle ils se trouvent n'est, pour la plupart d'entre eux, pas montrée au lecteur. Une fois de plus, il y a une antériorité dont on parlera a postériori. Si Shinako est triste, c'est car son premier amour est décédé; si Haru est serveuse dans un bar, c'est car elle a dû quitter le lycée. Il y a donc un déjà là, quelque chose qui existe avant le début du manga. Le passé, qui ne cessera d'être mentionné, ressassé a donc une place de choix dans le récit, et c'est en cela que les personnages n'auront de cesse de le chanter, de chanter cette chanson du passé.


Parallèlement à ce développement antérieur, l'auteure utilise ces personnages comme symboles, c'est ce dont je parlais, entre autres, plus haut dans ma présentation. En effet, certains d'entre eux symbolisent une facette du monde du travail japonais d'une manière ou d'une autre: ceux qui vivent de petits boulots, ce qui leur permet d'éviter le stress du monde du travail japonais, car ils désirent vivre leur rêve tel que Kinoshita qui veut devenir célèbre avec son groupe de musique; ceux qui vivent de petits boulots car ils n'ont pas encore trouvé leur voie tel que Uozumi; ceux qui vivent ainsi car ils n'ont pas d'autre choix tel que Haru; ceux qui ont persévéré tel que Shinako, qui était présentée comme responsable dès son plus jeune âge et symbolise la réussite sociale.


Cela nous amène donc à la thématique, récurrente dans le manga, éminemment racinienne et à laquelle plusieurs personnages seront confrontés, qui suit: le devoir ou la passion ? L'exemple par excellence qui l'illustre le mieux est évidemment Kuma, le patron du magasin familial: d'un côté il épris de Kyoko, et de l'autre côté, il doit assurer la suite du magasin familial. Ne pouvant faire les deux à la fois, il doit faire un choix.


Nous avions donc là un manga qui était très bon grâce aux relations de ses personnages qui étaient plus crédibles que la masse des autres de son genre, à son originalité, son ambiance très mélancolique, et le trait de son auteure. Néanmoins, l'emploi de l'imparfait n'étant pas une erreur, c'est contrit mais pas moins contraint que j'expliquerai ci-dessous pourquoi il était très bon.


Tout d'abord, ce qui frappe le plus rapidement le lecteur, c'est la scission très nette de qualité entre ce qu'il a été habitué et entre ce qui lui a été servi par la suite. Comprenons qu'arrivé à un certain moment,


quand Uozumi commencr à sortir avec Shinako,


l'histoire stagne, n'avance plus vraiment et devient rapidement répétitive. En effet, l'histoire se résume par après, durant quarante chapitres, soit le quart de l'oeuvre, à ce que


Shinako repousse Uozumi, arguant qu'il lui faut encore du temps pour faire avancer leur relation.


Dans l'absolu, soit, mais faire durer cette situation durant quarante chapitres est remarquablement usant pour le lecteur, a fortiori lorsque l'on sait la vitesse à laquelle ça a été réglé. Car oui, non contente de servir un passage à vide durant quarante chapitres à ses lecteurs, l'auteure leur présente


un Uozumi qui réalise en seulement quatre chapitres que c'est de Haru qu'il est réellement amoureux, et non pas de Shinako... Il aurait de toute évidence été préférable de mieux gérer le découpage des chapitres: au lieu d'en mettre quarante qui ne font pas avancer l'histoire pour au final l'expédier en quatre chapitres, il aurait fallu en mettre une vingtaine consacrée au besoin de réflexion de Shinako et les vingt-quatre restants pour une prise de conscience qui soit progressive pour Uozumi. Mieux encore, consacrer dix chapitres pour le besoin de réflexion de Shinako, dix pour une prise de conscience qui soit progressive pour Uozumi, et en mettre quatre pour la vie en couple d'Haru et Uozumi, ce qui aurait éviter à l'auteure de bacler cet élément-là en un chapitre bonus et de l'intégrer à l'histoire.


En conclusion, Sing Yesterday for me aura été très bon durant quatre-vingts chapitres, en proposant des thématiques originales, des relations crédibles, et une bonne ambiance, mais très moyen sur les quarante autres, en proposant une mauvaise gestion des chapitres et passage à vide redondant qui aura été expédié beaucoup trop vite.


Lu du 18/02/2020 au 12/04/2020
La note tend plus vers le 7,5.

Begi-
7
Écrit par

Créée

le 22 juil. 2021

Critique lue 223 fois

Begi-

Écrit par

Critique lue 223 fois

D'autres avis sur Sing "Yesterday" for Me

Sing "Yesterday" for Me
Shaqsp
8

Qu'est-ce qu'on va faire de toi ?

Kei Toume aime les personnages qui se posent des questions : sur leurs envies, leurs rêves, leurs talents et travers, leurs devoirs vis-à-vis d'une famille ou de leurs amis et leur place dans une...

le 1 nov. 2010

5 j'aime

Sing "Yesterday" for Me
Xerto
8

Un bon seinen

Sing Yesterday for me n'est pas vraiment un shojo, vu que le manga ne suinte pas le rose. Bien sûr, il est question d'amour dans SYfM, mais l'auteur crée une atmosphère particulière. Les tourments...

le 20 mai 2010

1 j'aime

Sing "Yesterday" for Me
Begi-
7

Chante-la encore

Sing yesterday for me, c'est l'histoire d'un manga dont j'ai attendu la réimpression des tomes durant quatre ans dans l'espoir de pouvoir les acheter à prix humain. Néanmoins, ni mes quatre années...

le 22 juil. 2021

Du même critique

Maison Ikkoku - Juliette, je t'aime
Begi-
7

Commères et quiproquos

Dès lors que l'on s'intéresse aux mangas de romance et aux comédies romantiques, il est difficile de passer à côté de Maison Ikkoku, tant ce dernier s'est imposé comme étant une référence de ces...

le 22 juil. 2021

1 j'aime

Sanctuary
Begi-
7

Ombre et lumière

Sanctuary prend place durant la fin du miracle économique japonais, peu avant la fameuse bulle spéculative japonaise, ce qui se ressentira fortement au fil des tomes, entre autre, de par le désir...

le 2 juil. 2020

1 j'aime

Slam Dunk
Begi-
7

Critique de Slam Dunk par Begi-

Slam Dunk, figure de proue du shônen sportif des années quatre-vingt, phénomène de cette époque et manga culte de la nôtre, est l'un des mangas les plus populaires du célèbre auteur Takehiko Inoue,...

le 7 sept. 2021