Des Algériens dans les tranchées
Porté par une forte volonté pédagogique, Turcos : le jasmin et la boue de Tarek, Payen et Mouellef, revient sur la présence des Algériens musulmans au sein de l’armée française pendant la première guerre mondiale.
Les Tirailleurs Algériens, surnommés « Turcos » depuis la guerre de Crimée, faisaient partie des 172 000 musulmans d’Algérie mobilisés pour combattre sous le drapeau tricolore de 1914 à 1918. La patrie, qui ne leur accordait qu’une demi-citoyenneté, exigeait leur sacrifice. Kamel Mouellef, l’initiateur de l’album Turcos, est l’arrière petit-fils de l’un d’eux, mort en juillet 1918. Choqué que ce sang versé soit souvent occulté en France et ne comprenant pas, par ailleurs, que la Marseillaise ait pu être sifflée lors du match France-Tunisie au Stade de France (2008), il souhaite raconter à travers l’histoire de son bisaïeul, celle des soldats qu’on qualifiait « d’indigènes ». « Tant qu’on n’aura pas réglé les problèmes de mémoire entre l’Algérie et la France, on n’en finira pas avec le racisme » nous dit-il, inquiet de la popularité du Front National dans les sondages.
Esprit de réconciliation
Kamel Mouellef, qui souhaite avant tout s’adresser aux jeunes, pense immédiatement à la bande dessinée comme médium attractif et pédagogique. Lors d’un festival, il rencontre le dessinateur Batist Payen qui lui présentera le scénariste Tarek. Historien de formation, celui-ci souhaite justement depuis longtemps écrire une histoire sur la première guerre mondiale. Cofinancé par Kamel Mouellef, le projet est accueilli par les éditions Tartamudo.
« Nous avons voulu montrer que l’ennui et la mort étaient les deux compagnes du soldat » témoigne le scénariste, qui préfère s’attacher aux faits que de rajouter ce qu’il qualifie de « pathos inutile desservant le récit ». Hélas, d’excellentes intentions ne produisent pas forcément une bonne bande dessinée. Le dessin et la mise en scène manquent ici d’ampleur ou de précision : hésitant entre objectivité historique et ressenti intérieur des personnages, les auteurs n’étreignent réellement ni l’un ni l’autre.
Vlad Bapoum