Une autre vie porte bien son titre : l’essentiel de l’album pourrait être tiré d’une autre série. Non seulement tous les enjeux annexes posés dans les vingt et un premiers volumes ont disparu, mais l’enjeu principal, c’est-à-dire la survie, laissant la place à celui de la vie en société, n’est plus présent que dans les deux scènes liminaires. C’est le fruit d’un hiatus de six mois dans l’intrigue – le temps pour les communautés de s’organiser, pour Rick et Negan de devenir barbus, et pour Michonne et Ézéchiel de disparaître.
En dehors, donc, de la première et de la dernière scènes, qui forment un intéressant jeu de miroirs, on se retrouve avec un mélange entre Les Sims au village et les bribes de la vie quotidienne d’un adolescent : le chef assure les relations publiques, le prisonnier s’ennuie dans son cachot, les survivants font pousser des légumes et le fils du chef balance entre ses états d’âme amoureux et la recherche de son stage de troisième. Ajouter à cela une résurgence de cette saloperie de morale états-unienne – armes à feu, communauté, production – à laquelle je faisais subtilement référence dans mes critiques de Passé décomposé et de Deuil & Espoir : autant dire que ce tome serait profondément chiant s’il ne commençait pas à exploiter ce motif du danger intérieur auquel se confronte fatalement toute œuvre de fiction organisée autour du thème du pouvoir.
La première variante, c’est Negan, incrusté parmi les gentils survivants comme un morpion dans une toison pubienne. Le procédé, certes un peu facile, qui consistait à le laisser en vie à la fin du cycle précédent commence à porter ses fruits – on imagine bien que Negan est la principale justification scénaristique de l’arrivée de nouveaux venus –, d’autant que la figure de l’ancien Sauveur en chef continue à jouer le double de Carl d’une part, de Rick de l’autre.
La seconde variante, c’est l’apparition de ces faux zombies que dans World War Z Max Brooks appelait les quislings. Là encore, ils sentent un peu le réchauffé, en plus de flirter avec ce grand-guignolesque qui marque de temps en temps Walking Dead. Mais ils apportent un peu d’incertitude ; le lecteur ne se demande pas si ces imposteurs sont vraiment dangereux – nul doute qu’il le sont –, mais plutôt comment nos gentils villageois amollis par le confort y réagiront.


Critique du tome 21 ici, du 23 .

Alcofribas
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le 4 avr. 2018

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Alcofribas

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