Pour ceux qui ne se seraient pas encore dit que les films et les albums de Riad Sattouf déclinent une seule et même œuvre sous différentes formes, ce premier volume du Jeune Acteur fait le lien de manière on ne peut plus explicite : Aventures de Vincent Lacoste au cinéma peut être lu comme un making of des Beaux Gosses, sans l’aspect commercial généralement associé à l’exercice – un making of douze ans après, mouais…
Du reste, on retrouve les mêmes thèmes et les mêmes procédés que dans le reste du travail de Sattouf, qu’il s’agisse de la partie la plus ouvertement autobiographique (les Beaux Gosses, donc, mais aussi Retour au collège ou l’Arabe du futur), des histoires en une planche (la Vie secrète des jeunes ou les Cahiers d’Esther), et même du volet « anticipation » (Pascal Brutal ou Jacky). Ce qui cimente tout ça, c’est avant tout un intérêt jamais démenti pour la jeunesse, de remarquables qualités d’observation et une interrogation permanente sur les différentes empreintes qu’une société laisse sur un individu. Et bien sûr ce trait caractéristique et cette mise en couleurs qui va rarement plus loin que la bichromie.
Ce que cet album propose de plus, ou d’un peu différent, c’est d’abord quelques faits. En plus des traditionnelles anecdotes de tournage et de casting, on y apprend ainsi l’admiration de Sattouf pour Truffaut – ce qui, à la réflexion, n’est pas très étonnant. Comme, en plus d’avoir le sens de l’observation, Sattouf a celui de la formule, c’est souvent bien vu – « Ce Vincent Lacoste était introverti, raide et mou à la fois. Mais sa tête était drôle. // Ce n’était pas le nouveau Jean-Pierre Léaud, bien sûr… Mais je n’étais pas le nouveau Truffaut non plus… » (p. 19).
À mon sens, un autre intérêt de l’album tient aux points de vue employés. Ces Aventures... sont composées de trois parties de longueur inégale, Lacoste assurant la narration de celle du milieu, Sattouf celle des deux autres. (Le scénario est crédité à « Riad Sattouf, d’après les histoires vraies de Vincent Lacoste », à la manière des Cahiers d’Esther.)
Le casting et la sortie des Beaux Gosses bénéficient donc d’un double regard – le tournage étant raconté du seul point de vue du comédien néophyte. En soi, c’est déjà intéressant. Est-ce que c’est drôle ? Parfois, comme lors de l’audition, quand Lacoste (se la) joue à la façon d’Al Pacino dans Scarface : « C’était incroyablement mauvais et outrancier » (p. 24) aux yeux du réalisateur ; « J’étais assez fier de moi après » (p. 49), raconte l’acteur.