Alma
6.4
Alma

Manga de Shinji Mito (2019)

Je me prétends pas être un bon critique, ni même un mauvais à vrai dire, mais je pense qu'Alma mérite au moins un avis positif afin que chacun puisse trouver un juste milieu entre toutes les qualités que je lui trouve et tous les défauts qui lui sont reprochés par la seule et unique autre critique présente sur ce site (en tout cas à l'heure où j'écris ces mots).


Alma est une série qui transpire le travail indépendant, presque underground, d'un créateur débutant mais qui sait où il va (c'est quatre tomes et une fin qui s'assume, pas d'histoire à rallonge comme on en a trop souvent vu) et qui donne tout son amour dans chacune de ses planches . Pour beaucoup il s'agira de mon pire argument, là où au contraire je considère qu'il s'agit du plus important: la totalité des défauts mais aussi des qualités de la série sont explicables par l'amateurisme et le caractère subversif mais sincère de l’œuvre.


Alors certes, l'histoire va vite. Trop parfois pour nous permettre de bien ressentir l'aspect poétique que l'auteur cherche à transmettre, trop aussi pour bien identifier et apprécier chaque personnage, mais l'essentiel de l’œuvre est transmis malgré la vitesse, et même si je n'aurai pas craché sur une série en six voire huit tomes pour diluer l'action, l’œuvre prend quand même le temps de délivrer son message.
Le plus gros problème de l'action n'étant pas tant lié à la temporalité mais au dessin, qui même splendide et très détaillé, rend les mouvements et les combats parfois incompréhensibles, impression souvent amplifiée par un découpage inadapté. C'est probablement le plus gros défaut, présent dans les quatre tomes, et celui qui repoussera le plus les fans de bande dessinée privilégiant la forme au fond, qui avant d'apprécier une histoire, des personnages ou une ambiance veulent s'assurer d'un esthétisme et d'un dessin de qualité.


Mais malgré ses défauts, et pour les lecteurs qui savent apprécier une œuvre sans nécessairement lui coller des étiquettes, Alma représente ce qu'une génération de mangas undergrounds n'a pas su faire passer avec classe. A mi-chemin entre Nausicaä de la vallée du vent et Ghost in the shell, l'histoire présente avec fluidité un monde semblable à bien d'autres lui étant antérieurs avec ses métropoles en ruine, ses pirates des airs, ses androïdes rebelles et ses derniers humains aux origines germaniques planqués derrière des murs (c'est à se demander si le monde entier n'est pas constitué de refs à l'attaque des titans). Pour autant l'expérience reste une bouffée d'air frais, même si cet air porte avec lui des odeurs qui viennent chatouiller notre mémoire, et c'est parce qu'Alma reste très porté sur la poésie voire la philosophie. Là où ses prédécesseurs avaient tendance à privilégier la beauté d'un paysage ou d'un personnage, Alma se concentre sur les idées. Si Ray peut sembler incompréhensible, c'est parce qu'il comprend lui même au fur et à mesure de l’œuvre qui il est et ce qu'il est censé faire, tout comme une grande partie des autres personnages. Et au final la vitesse de l’œuvre en devient presque un avantage, les points de vue sont présentés, opposés, ils ne vous plaisent pas? On s'en fout, le train repart déjà, pas de débats philosophiques et de flashbacks interminables au milieu des combats, nous avons déjà tous été traumatisés par cette putain de balançoire dans Naruto.


Si vous restez coincés aux catégories "seinen" ou "shonen", et que l'idée d'un seinen avec des graphismes que vous qualifieriez de shonen vous dérange, passez votre chemin. Alma est une bande dessinée qui n'a pas le temps de coller à vos préjugés et à vos attentes, et je ne comprends même pas que l'on puisse attendre d'une œuvre d'aller là où on le veut. Alma, à l'image de son héros, va de l'avant, embarquant avec elle tous ceux qui voudront bien la suivre, et tant pis pour les aigris, les élitistes et tous ceux qui aiment trop leur confort pour être dérangés dans leurs habitudes.

Farango
9
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le 24 avr. 2022

Critique lue 139 fois

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