Annie Sullivan & Helen Keller par belzaran
J’avais lu tant de louanges pour « Annie Sullivan & Helen Keller » que je me suis senti obligé de le lire et ce malgré le fait que ce soit une double biographie (la mode des biopics BD ou cinéma m’ennuient un peu). Cependant, le sujet était passionnant : une femme qui est presque aveugle devient la préceptrice d’une fille sourde et aveugle ! J’avais été conquis par les extraits que j’avais vu où l’on découvrait Helen, l’enfant, découvrir le monde. C’est donc avec enthousiasme que je me lançais dans cette lecture (sélectionnée à Angoulême). Le tout est scénarisé et dessiné par Joseph Lambert et publié chez Ça & Là / Cambourakis.
Même si le propos semble se centrer sur Helen, la vie d’Annie nous est également contée, en partant de son enfance. Orpheline, elle vivra dans un hospice où son frère mourra. Traumatisée et colérique, elle est finalement prise en charge à l’institut Perkins, une école pour aveugle. On est alors au 19ème siècle. Cela permet d’imaginer le niveau de l’éducation des handicapés à ce moment-là. Heureusement, Annie sera opérée plusieurs fois, recouvrant suffisamment la vue pour pouvoir lire. Elle va alors devenir brillante scolairement sans toutefois perdre son caractère difficile. Au début de l’ouvrage, elle est donc envoyée dans le Sud, chez les Keller pour s’occuper d’Helen. Quasiment sauvage, Helen ne supporte que de rares contacts avec ses parents. Surtout, son père lui passe tout. Ainsi, prendre en charge son éducation va être particulièrement difficile.
Tout l’intérêt de l’ouvrage résulte donc dans le « comment ». Comment Helen peut-elle communiquer ? Comment peut-elle apprendre ? Et comment représenter cet apprentissage ? Joseph Lambert utilise une icônographie efficace et pertinente qui permettra sans peine à tout un chacun à se faire une idée des méthodes d’enseignement.
Si le sujet est fort, il n’a pas la force que l’on pourrait attendre. En refusant clairement l’empathie (la peur du mielleux ?), l’auteur nous met à distance les deux personnages et le récit paraît assez froid. Clairement, le lecteur n’est pas mis dans le bain et on se trouve devant une biographie double assez convenu. C’est peut-être une question de pudeur. Il faut bien avouer que la narration reste assez poussive dans l’ensemble, munie de flashbacks pas forcément bien intégrés. L’emploi d’un gaufrier presque toujours identique n’aide pas à l’affaire.
Cependant, il ne faut pas nier l’intérêt que suscite l’ouvrage. Cette histoire assez extraordinaire reste passionnante par son côté inouï. On prend plaisir à la lecture et à découvrir les avancées d’Helen.
Concernant le dessin, je n’ai pas été particulièrement séduit. Les parties apprentissages sont très inventives, le reste est assez commun, voir répétitif. Les couleurs, assez ternes sont parfaitement adaptés à l’époque et au sujet.
Au final, je suis très embêté par cet ouvrage. Le sujet est tellement fort et difficile à traiter qu’il est compliqué de reprocher certains écueils à l’auteur. Mais objectivement, on ne peut nier quelques longueurs. Quand on pense qu’Annie et Helen ont eu une relation quasi-fusionnelle, on ne peut que regretter la froideur de l’ensemble.