On est tout d’abord interpelé par le titre franc, direct et peut-être violent, puis on voit la liste des prix reçus, la curiosité l’emporte et fait du lecteur un enfant incapable de résister à ses envies. Curiosité bien vite récompensée donc, puisque c’est une pure merveille que cette bande-dessinée, par son graphisme et par son histoire très politiquement incorrecte.

Elle révolte cette histoire, de plusieurs manières et la richesse du scénario n’en a que plus de mérite. D’un côté un jeune riche parisien qui prend le pari qu’il parviendra à transformer le premier malheureux venu en assassin de bourgeois, de l’autre le pauvre malheureux sur qui le destin tombe comme une malédiction. S’étale alors sous nos yeux un Paris fait de divisions sociales, de luxure, de dominations et de soumissions, un Paris peut-être encore plus sale dans les salons dorés que dans les quartiers défavorisés. Cette histoire ira bien au-delà des espérances de son initiateur qui, ce n’est pas une surprise, se retrouvera rattrapé par son idée décadente.

L’histoire frappe en plein visage, les injustices, la condescendance de certains aristocrates vis-à-vis du bon peuple est tout simplement écœurante. Les cloisons qui existent entre les catégories sociales semblent infranchissables et sont entretenues, d’un côté comme de l’autre, par certains qui ne veulent pas les voir tomber. Le déterminisme social, qui quoi qu’on en dise existe encore, donne l’image que naître dans un quartier c’est naître avec un destin irréversible collé au visage.

Le trait est nerveux, le graphisme net et réaliste et rajoute à cette violence des gestes et des idées, on se surprend à soupçonner que cette bande-dessinée est tout à fait transposable aujourd’hui et, si on a vu le film, on la compare au très bon Un Fauteuil Pour Deux dans lequel deux riches imbéciles font le pari non moins imbécile de transformer un pauvre en riche et un riche en pauvre. On voudrait alors être totalement étanche à ces idées complotistes qui laissent à penser qu’un petit groupe de personnes décideraient de nos destinées, alors on apprend que nous sommes bien tous écoutés et que le complot pourrait bien exister…
Jambalaya
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le 19 juil. 2013

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