Avouons le : que se soit DC ou Marvel, il est des plus ardu pour le néophyte total en comics d'aborder l'un des deux univers sans s'y perdre. Souvent, les histoires se croisent entre elles, se répondent et se référencent, quand elles ne font pas se retrouver une douzaine de héros pas toujours connu, comme c'est le cas dans la ligue des justiciers ou pour les vengeurs.
Mais heureusement pour nous, pauvres néophytes perdus dans un monde immense sans aucune connaissance de ces héros, prêt à donner nos maigres deniers dans des comics qui paieront les quintaux de cocaïne servant à la création du prochain film de Zack Snyder, DC a pensé à nous et à son porte-monnaie lorsqu'en 2011 elle a crée New 52, une série de reboot suite à un énième remodelage de l'espace temps, et qui ré-écrit les origines des héros tout en se voulant accessible pour le novice.
Justice League Origins est ainsi la reprise New 52 de la Ligue des justiciers, écrite par Geoff Johns, (in)connu (pour ma part) grâce à ses travaux sur Green Lantern, et dessiné par Jim Lee, connu pour son Batman Silence. Ainsi, l'ouvrage s'impose le challenge bien corsé de devoir plaire tant aux fans de DC qu'aux néophytes. Et malheureusement, il se vautre.
Pourtant ça commençais pas mal. Pas de longue scène d'exposition, on entrait directement en scène avec un côté un peu « Injustice », grâce des héros qui se molestent copieusement. Mais très vite on se trouve face à un des principaux problèmes de l'oeuvre : les personnages, pourtant des super-héros, n'ont aucun charisme. Là où on s'attend à voir les plus grands héros de la galaxie, on se retrouve avec une cohorte d'adolescents qui passent leur temps à se chambrer en tuant des aliens , comme dans un vulgaire teen-movies. Tout les personnages sont totalement hors-sujet par rapport à leurs modèles. Par exemple :
-Hal Jordan est une tête à claque qui passe son temps à chambrer tout le monde avec puérilité, et sans aucune classe.
-Batman est inutile et donne l'impression d'être vraiment en dessous des autres (logique, lorsqu'il est comparé à Green Lantern ou Superman). De plus, on a vraiment l'impression d'une version édulcorée du héros, qui oublie certains des traits qui font la complexité du personnage, comme sa paranoïa (il révèle son nom à Hal Jordan au bout de 15 minutes)
-Wonder-Woman : était-elle obligée de faire comme si elle était une femme préhistorique sorti de sa grotte tout en arborant un air nunuche ? (« Il n'y a rien de meilleur que la crème glacée » Là, j'ai ri et pleuré en même temps)
-« C'est bien d'avoir des principes.Dommages que tous les dirigeants ne soient pas comme ça. » Devinez qui dit ça, avant d'aller agresser une bande de militaires ? Superman. Oui oui, le Boy-scout ultime en ado désabusé… Et si encore ça suffisait à lui donner de la profondeur ou du charisme… mais non, là, c'est complètement inexploité. On a juste l'impression d'un décérébré hyper-violent…
-Aquaman n'a rien d'un prince, c'est juste un bourrin puéril, comme les autres.
Seul Cyborg s'en sort mieux que les autres grâce à un caractère plus supportable et un début d'histoire originale, sans être révolutionnaire non plus. Flash aussi est plus sympa, mais rien d'extraordinaire.
Au final, les personnages sur-humains, qui devraient être un plus de n'importe quel comics de super-héros, sont ici une balle dans le pied de la BD. Je ne suis pas contre la réécriture des idoles, mais uniquement lorsque c'est révélateur d'une vision du héros, et lorsque c'est proche un minimum de l'original (sinon autant créer d'autres personnages). Là, c'est juste râté. Mais avec un scénario potable, ça devrai passer, non ?
Non.
Car Avengers.
La BD reprend trait par trait le scénario du film à succès, avec les mêmes étapes : des héros qui ne se connaissent pas au début, s'affrontent, puis sont obligés de s'allier pour affronter une menace extraterrestre bien plus importante. Ils enchaînement les combat contre une horde d'ennemis (le tout en détruisant la moitié de la ville). On envoie le héros qui n'a pas de pouvoir pour refermer le passage, et les autres affrontent le chef des monstres. Ils vainquent, deviennent connu, mais une nouvelle menace se présente et … FIN !
Le film n'était déjà pas folichon, mais on avait au moins certains héros pour compenser (coucou Downey Junior), et des scènes d'action bien faite.
Là, ça fait juste putassier et racoleur d'une nouvelle génération de lecteur qui sont nés avec les divers films de super-héros typés action. Mais réduire le comics à ça, c'est oublier toute la tradition d’œuvres réfléchies et tragiques qu'à crée le modern age depuis Watchmen et The Dark Knight Return. Là, on a rien, pas de réflexion sur les rôles des héros, pas de méta-discours ou de tentative d'élaboration d'une quelconque réflexion. Juste de la baston, de l'action déjà-vu mille fois.
Là, il faut avouer que ça pourrait presque être un point positif du comics. Les combats ne sont pas totalement loupée. On peut leur reconnaître du punch, même si ils sont souvent brouillons et manquent totalement d'enjeux. C'est là qu'on se rend compte que l'action doit être mélangée avec une vraie implication derrière. Bizarrement, des super héros qui affrontent une horde d'extraterrestre, ça n'intéresse personne, et ça ne fait monter aucune tension.
Ainsi, que reste-t-il à Justice League origins pour se rattraper ? Assurément, les dessins Jim Lee, qui, bien que typés comics de super-héros modernes, sont excellents. Les supers-héros sont classes, les différents dessins où ils sont en actions les iconisent très bien et les doubles pages sont parfois sublimes. C'est dommage qu'un style si super-héroïques se retrouve avec une écriture autant anti-épique. Après, ça reste du Jim Lee : allergiques aux muscles hypertrophiés et aux bonasses à gros seins, passez votre chemin (coucou, Plokijun). Mais au final, même avec ça, il est évident que Justice League Origins ne restera pas dans les mémoires, sinon comme un beau loupé. Sans intérêt, brouillon et dénué de charisme, le titre échoue à imposer une histoire épique et à introduire le néophyte dans une histoire qui représenterai la synthèse de ce que peut offrir le comics de super-héros, tandis que les habitués du genre n'y verront qu'un énième comics d'action sans enjeux ni profondeur, à mille lieux des chef-d’œuvre du genre. Que vous soyez l'un ou l'autre, passez votre chemin.