Bendis rentre dans l'Héroïc Age. C'est la dernière grande partie de son interminable run sur les vengeurs. Et je trouve que cette nouvelle ère démarre en tenant ses promesses.
Malgré mon enthousiasme suite au premier deluxe de New Avengers comprenant deux arcs, l'historique Disassembled et le spectaculaire Breakout, il faut avouer que la série phare de l'éditeur rentrait vite dans une certaine monotonie, parsemée d'events, d'éclairs fugaces de talent, mais surtout de beaucoup de vide sans qu'on avance toujours. C'était par ailleurs relativement sombre, avec une équipe en permanence en clandestinité et sous pression, que ce soit dans la tourmente de Civil War, la paranoïa de Secret Invasion, ou l'ombre obscure du Dark Reign.
Avec l'Heroïc Age, la lumière revient. L'équipe se rassemble sous l'égide d'un Steve Rogers retrouvé, tandis que la trinité Marvel apaise ses tensions internes. Ainsi, Thor fait de nouveau partir des vengeurs, Hawkeye enfile avec son costume violet éclatant (abandonnant au passage toute la haine qu'il portait en lui depuis House of M, à mon sens ce retour arrière est brutal et regrettable vis à vis de la caractérisation que Bendis lui donnait jusque là).
Mais ce nouveau statu-quo, cette intention de faire renouer les héros avec la lumière, elle se traduit aussi à travers l'histoire et les dessins.
Au dessin on adjoint donc un Romita Jr à la série. Son style actuel a souvent été critiqué. Oui c'est brouillon, mais en perdant le réalisme graphique de New Avengers (très marqué à ses débuts avec Finch), on obtient quelque chose de beaucoup plus positif. Si certains planches ne sont pas à mon goût, Romita assure sur les moments importants (la scène d'Immortus est super prenante visuellement, Ultron a un bon look, son New York est folklorique à souhait comme l'exigeait le script, l'antre du Maestro a une vrai atmosphère). Il simplifie néanmoins à l'extrême les visages de certains personnages (Apocalypse, Barton...) ce sera mon plus gros reproche. Donc j'aime le style de Romita, je trouve qu'il réussit encore à transmettre des choses avec son dessin, mais sur une série chorale comme ici ce n'est pas non plus l'homme de la situation.
Au scénario, c'est un bol d'air frais dans le run de Bendis. Le scénariste se décide à lâcher ses intrigues de pseudo-complots, et de partir dans quelque chose de très coloré, de très direct, partant dans tous les sens avec plein d'actions et abandonnant les longues discussions dans la cuisine. Au programme, on croise pas moins que les plus terribles vilains du monde Marvel: Kang, Immortus, Ultron, Apocalypse, le Maestro! Du lourd et encore plus, d'autant que tous cohabitent correctement dans cette intrigue. Le lecteur est pris dans la tempête d'un paradoxe temporel dont il perçoit progressivement les fils, les tenants et les aboutissements. "Encore un paradoxe temporel", et oui on est dans les comics, le sujet revient tout le temps sur le tapis. N'empêche que j'ai bien aimé, que la perte de repère dans le futur est intéressante, que la boucle n'est pas si mal faite.
Bendis relance son run avec enthousiasme après la débâcle Siege. Il décide enfin de s'attaquer aux méchants historiques de la franchise, à commencer par le roi du temps, Kang en personne. C'est également ici que commence les ramifications qui auraient dû conduire à une grande épopée consacrée à Ultron. Malheureusement, le scénariste manquera de temps, et si j'apprécie Age of Ultron, on ne va pas se mentir, l'histoire n'est pas vraiment consacré au robot surpuissant que nous présente Bendis dans le présent album.