Avec Blue (1997), Kiriko Nananan nous livre une œuvre délicate et minimaliste, une plongée dans l’intimité de l’adolescence où les émotions se murmurent à travers les non-dits et les regards furtifs. Si ce manga se distingue par son approche subtile et introspective, il peut aussi laisser certains lecteurs en quête de plus de dynamisme sur le bord de la plage.
L’histoire suit Kayako Kirishima, une lycéenne réservée, et Masami Endo, une camarade de classe un peu plus rebelle, alors qu’elles développent une relation ambiguë, entre amitié profonde et attirance amoureuse. Ce n’est pas une romance classique avec des déclarations flamboyantes ou des péripéties dramatiques, mais plutôt une exploration des nuances de leurs sentiments, où chaque geste et chaque silence compte. C’est poétique, touchant, mais parfois frustrant par son rythme contemplatif.
Visuellement, le style de Nananan est d’une simplicité désarmante. Les lignes épurées et les compositions minimalistes renforcent l’atmosphère intimiste, mais peuvent donner l’impression d’un manque de variété. Les décors sont rares, laissant toute la place aux expressions des personnages, souvent discrètes mais puissantes. Cependant, ce choix esthétique peut aussi sembler monotone, surtout pour ceux qui aiment les œuvres visuellement plus dynamiques.
Le plus grand atout de Blue est sa capacité à capturer l’intensité et la confusion des premières émotions amoureuses. La tension entre Kayako et Masami est palpable, mais aussi très retenue, ce qui reflète bien l’incertitude et la pudeur de leur âge. Cependant, ce réalisme peut aussi devenir un frein : l’absence de grands rebondissements ou de conclusions nettes laisse un goût d’inachevé, comme si l’histoire se perdait dans ses propres silences.
Les dialogues, bien qu’économes, sont souvent percutants, mais ils laissent parfois le lecteur deviner ce qui se passe vraiment dans la tête des personnages. Ce choix narratif, volontairement ouvert, fonctionne bien pour certains mais peut frustrer ceux qui aiment des récits plus explicites.
En résumé, Blue est une œuvre intimiste et introspective qui brille par sa sensibilité et sa capacité à évoquer l’indicible. Kiriko Nananan livre une histoire touchante et réaliste, mais son minimalisme et son rythme lent risquent de ne pas convenir à tous les lecteurs. Un manga à savourer comme une journée mélancolique au bord de l’eau : apaisant pour certains, mais un peu trop calme pour d’autres.