Voilà un manga que j’avais très hâte de voir débarquer en France après l’annonce de Kurokawa.
Blue flag du mangaka KAITO est très attendu car l’histoire est différente de ce qu’on peut attendre. Edité sur l’application Shônen Jump+ (premier magazine numérique des éditions Shueisha) il est destiné à un lectorat adolescent masculin et féminin.
En France, il sera vendu comme un shôjo, pourquoi ? Et bien parce que le thème principal sont les relations d’amitié et amoureuses entre les différents personnages. Histoires d’amour = filles. Bon. Pourquoi pas. Mais on sait bien qu’on sous entend par shôjo : cul-cul, niais, mauvais etc. Allez, allez je sais, moi-même je l’ai pensé pendant des années avant de replonger dedans et de découvrir de très bons titres. Tu es un garçon et tu as regardé Sex education ? Et bien tu peux lire Blue flag (bon, y a pas de cul dedans !).
Au début des publications en France il a été facile d’utiliser les termes shônen (manga pour garçon), shôjo (manga pour fille), seinen (manga pour adulte)… Malheureusement, le système c’est retourné contre nous. Classer des livres par le sexe de son lecteur est réducteur. Au Japon chaque magazine s’adresse à un public différents, plus que le sexe, c’est l’âge qui importe ou le contenu. C’est ce qui devrait aussi nous intéresser, on ne lit pas avec ses organes génitaux. Les fabricants de jouets sont tombés eux aussi dans le piège pour faciliter la vie des parents. 40 ans plus tard nous avons des rayons rose et bleu… Oui nous facilitons la vie des parents et des libraires, mais nous enfermons aussi les lecteurs dans leur « genre » et c’est bien dommage. Mais c’est un détail. L’essentiel c’est que Blue flag soit disponible en France et que tout le monde puisse profiter de cette excellente histoire !
Dépasser les genres, soyez ouvert d’esprit, nourrissez-vous de ce que les manga ont de meilleur à nous offrir sans penser au genre. Soyez l’artisan de votre culture manga, ne vous arrêtez pas à une couverture ou un style. Vous n’en serez que grandit.
L’histoire
Au printemps de leur année de Terminale, trois élèves se retrouvent à un carrefour de leur vie. Taichi est dans la même classe que Tôma, un ami d’enfance à qui tout réussi et que Futaba, une fille qu’il a du mal à supporter. Un jour, Futaba se confie à lui et lui avoue qu’elle est amoureuse de Tôma. Tranche de vie réaliste sans pour autant tomber dans le mélo. On est avant tout dans une histoire positive où les sentiments s’entrechoquent.
Le héros, Taichi, a un gros complexe d’infériorité accentué par son ami d’enfance Tôma qui est juste parfait en tout. Pis il regarde de haut la petite Futuba qui est timide et empotée. Au début il la déteste, mais petit à petit il va tenter de l’aider. Où vont aller les sentiments contradictoires de trio ?
Blue flag est bien plus qu’une simple romance. Il met à nu les sentiments de la jeunesse japonaise, les douleurs de l’amour, le passage à l’âge adulte, les difficultés à se trouver une place quand on entre pas dans le moule de la société… Un instantané de la jeunesse actuelle dans toute sa complexité, sans tabou. Cette dernière année de lycée c’est le rite de passage, celle où tout peu exploser car ils sont tous à un carrefour de leur vie. Plus des enfants, mais pas pour autant des adultes.
La représentation LGBT (car oui il y en a !) est naturelle, elle sert l’histoire et n’est pas matière à fantasme ou à moquerie comme on peut souvent la rencontrer. Nous sommes pas dans un contexte de fan service avec des personnages qui pourraient être gay, mais-qu-on-le-dit-pas-vraiment, nous ne sommes pas dans une série à ship, et les personnages gays ne sont pas non plus des persos secondaires uniquement là pour faire rire. Mais nous ne sommes pas pour autant dans un boy’s love ou un yuri. Loin de là. Non, ils font partis d’un tout, de cette jeunesse complexe comme des acteurs normaux de cette histoire. Blue flag est en phase avec son temps et fait exploser les clichés des triangles amoureux traditionnels.
Graphiquement, c’est magnifique, KAITO n’est pas un débutant et son style moderne est très frais. Les dessins sont d’une très grande qualité, et la mise en page recherchée. Il y a vraiment des moments ou le découpage donne une force énorme au récit. Les parallèles entre les différents scènes et personnages où l’auteur nous sous-entend ce qu’il n’exprime pas avec des mots détonne avec d’autres travaux pour adolescents.
Foncez sur Blue flag, ne vous arrêtez pas à la couverture, tentez l’expérience et vivez cette dernière année de lycée avec Taichi et ses amis. C’est un plaisir immense de retrouver ce titre dans le catalogue de Kurokawa. Au Japon le 5e tome vient de sortir et la série est toujours en cours. Vous pouvez lire le dernier chapitre paru en anglais et en espagnol, légalement et gratuitement sur l’application Manga plus de SHUEISHA.