La religion est semble-t-il une source d'inspiration intarissable. Mais avec Wilfrid Lupano et Mako aux commandes, les sermons du Père Bruno n'ont plus grand chose en commun avec ceux entendus dans nos bonnes vieilles églises. Prenez et mangez-en tous... Car ceci est diablement étonnant !
La cité-forteresse de Christopolis est probablement le dernier refuge valable pour les hommes au milieu de ce monde en perdition. A l'extérieur des murailles, il faut l'avouer, c'est le bordel. Quelques vestiges de la civilisation trônent encore ici ou là arrosés par les régulières pluies acides, mais il ne faut pas espérer trouver une ville tenant encore debout. Quant à la population des environs, elle n'est pas très belle à voir du fait de mutations génétiques diverses et variées. Quelles en sont les raisons ? Dieu seul le sait, et il semble bien décidé à le garder pour lui.
La situation ne pouvant continuer ainsi, un convoi religieux s'apprête à quitter l'enceinte de Christopolis afin de rechercher des humains n'ayant pas encore muté. Le Père Bruno, accompagné de Frère Elias et d'un dénommé Angel, font partie de cette mission d'évangélisation. Malgré un environnement hostile, il se mettra rapidement au boulot à grand renfort d'hosties croustillantes aromatisées au bacon. Et tant pis si ses fidèles sont un peu difformes et malodorants...
L'originalité est le maître mot de cet album qui ne peut qu'attirer notre attention. Le premier choc est d'ordre visuel. Mako, dont c'est ici le premier album, explore un style très personnel mélangeant un trait vif et moderniste à une colorisation brute et chaleureuse. Une approche graphique que l'on pourrait qualifier de peinture numérique, pour le moins efficace. Du côté du scénario, Wilfrid Lupano confirme ses talents d'écriture et son goût pour les univers quelques peu tordus. Passées les dix premières pages, dont la densité et parfois même le dessin compliquent un peu la compréhension, on prend un malin plaisir à suivre l'expédition de notre Père Bruno armé jusqu'aux dents, et de son compagnon Angel, surtout lorsqu'ils se lancent dans des joutes oratoires au langage châtié.
Sans concession, fun et décomplexé, Corpus Crispies croustille sous la dent pour mieux libérer sa saveur très surprenante du genre : - « Eh ben alors, si c'est pas un humain, c'est pas grave qu'on en mange. »