Une saga familiale libano-brésilienne

Fabio Moon et Gabriel Ba s’étaient fait connaître dans nos contrées grâce à « Daytripper », un livre construit autour d’histoires courtes. Les deux jumeaux, qui scénarisent et dessinent à quatre mains, reviennent en force avec « Deux frères », l’adaptation de l’œuvre de Milton Hatoum. C’est donc un roman graphique de plus de 200 pages en noir et blanc qui nous est proposé chez Urban Comics dans la collection Urban Graphic.


On comprend vite pourquoi les deux frères ont choisi ce thème… Comme eux, les deux protagonistes sont jumeaux. Une fille, dans leur adolescence, va les laisser meurtris et leur fera prendre des chemins bien différents. On est loin de la dépendance qu’ont certains jumeaux l’un envers l’autre. On traîne plutôt autour de la relation toxique.


Le livre est l’occasion de découvrir la vie d’une famille libanaise exilée au Brésil. Avec de multiples flashbacks, les auteurs reconstruisent la saga : la rencontre des parents, les naissances, les clashs, la servante indienne... Jusqu’à l’évolution de la société et de la ville en elle-même. Hélas, la narration n’est pas toujours très claire et à la fin de la (longue) lecture, on sent qu’il faudrait s’y replonger pour bien tout saisir. Cette façon de raconter l’histoire est ambitieuse, mais pas forcément réussie ici. La faute aussi à une histoire qui traîne un peu en longueur sur la fin. Après les premières passions, on s’essouffle à rythme des scandales à répétition.


Malgré tout, « Deux frères » traite d’un thème fort : la famille et ses liens qui, même distendus, poussent à revenir même si cela fait qu’empirer les choses. L’ouvrage est dépaysant, la villa de la famille faisant presque office de personnage principal, lieu tragique dont la vente scellerait la fin de la dynastie.


Si le scénario déçoit quelque peu, ce n’est pas le cas du dessin. Les auteurs optent pour un noir et blanc puissant, qui n’est pas sans rappeler les maîtres en la matière. Les décors sont splendides et les personnages, stylisés, font preuve de toute la passion et dynamisme nécessaire à l’ouvrage. Rien que pour le dessin, l’ouvrage vaut le coup. Les auteurs parviennent aussi bien à nous proposer de grandes cases fourmillant de détails, comme des beaucoup plus simples, centrés sur un personnage.


« Deux frères » souffre d’une narration et d’un rythme mal maîtrisé. Saga familiale originale par sa localisation et le fait de présenter des jumeaux antagonistes, il vaut essentiellement pour son traitement graphique assumé et, avouons-le, splendide.

belzaran
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le 30 mars 2016

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