Critique de Stéphane de AAAPOUM pour les Inrockuptibles
Après des années de désaffection, les cowboy réinvestissent en force le neuvième art. Gus de Blain, Martha Jane Cannary de Blanchin et Perrissin, ou encore le duo Zeb et Ned du Big Foot de Dumontheuil... nombreux sont les garçons vacher nouvelle vague qui débarquent en ce moment pour reprendre la tradition du "surwerstern" tel qu'aimait à le définir André Bazin ; c'est à dire un récit de genre "qui aurait honte de n'être que lui-même et chercherait à justifier son existence par un intérêt supplémentaire d'ordre esthétique, sociologique, moral, psychologique, érotique". Le projet de Gus, ainsi, s'affiche fièrement : il s'agit de faire du neuf avec du vieux (comme lorsqu'il troque les "gros nez" contre des "longs"), de détourner avec amour les modèles et esthétiques d'antan (Lucky Luke, Les Pieds Nickelés) pour en poursuivre l'imaginaire sur une tonalité différente (l'âpreté des duels au colt s'efface au profit du bucolique des vagabondages romantiques). La dimension supplémentaire du surwestern façon Blain, alors, transparait dans la décomplexion affichée de l'auteur à se projeter dans les personnages. Qu'il soit Isaac le peintre pirate dans sa précédente série ou, ici, Gus le cowboy romancier, l'aventurier n'est plus tant un homme d'action qu'un homme qui rêve d'action et se rêve autre. Avec ces deux alter-ego, le flibustier incarnant le désir de dessin et le cowboy celui de l'écriture, Blain poursuit la tradition des grands récits d'aventures dans leur meilleure veine, mais projette surtout le fantasme attachant de l'auteur de bande dessinée.
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