Eva aux mains bleues, c'est la chronique de l'été d'une jeune fille qui entre dans l'adolescence, été qu'elle passe chez sa grand-mère, entourée d'une famille représentée essentiellement par des femmes.
C'est un album apparemment sympathique, où l'ambiance familiale des vacances d'été est bien rendue. Mais j'aurais apprécié plus de profondeur psychologique pour ce personnage entre l'enfance et l'adolescence, ou bien plus de poésie dans le quotidien tranquille d'Eva. Sont présents les thèmes de la différence (le grand-père et le petit frère d'Eva ne parlent pas, par choix), de la transmission d'une génération à l'autre (avec la confection de la confiture), du premier amour, de l'entrée dans l'adolescence. Tous intéressants, mais aucun franchement traité : peut-être que trop de motifs sont ici esquissés et que l'auteur n'a pas su trouver le temps ou la place de les travailler.
Autre problème pour ma part, même s'il est loin de résumer l'album : l'allusion aux psys de tous bords, dont l'hypocrisie est comparée à celle des hommes politiques, m'a en revanche franchement agacée. On sent qu'Isabelle Dethan ne connaît pas grand-chose au sujet (elle mélange en vrac psychiatres, psychologues, psychanalystes) et nous assène là un bon gros cliché. M'a également titillée la soi-disant "folie" de la famille d'Eva - qui ne relève que de la différence ou de la bizarrerie ; là aussi, on a envie de dire à l'auteur qu'elle ne sait pas ce qu'est la maladie mentale, sans quoi elle n'en ferait pas un étendard familial.
Voilà : une lecture tout de même agréable dans l'ensemble, mais qui manque à mon sens un peu de profondeur, qui s'attarde trop dans certaines facilités ; ce qui n'est finalement pas étonnant de la part d'Isabelle Dethan. Entre la poésie de Mémoire de sable et l'embourgeoisement de Sur les terres d'Horus, elle montre ici clairement qu'elle a fait son choix. D'ailleurs, la fin de l'album est vraiment très convenue.