Des dessins bas de gamme en noir et blanc racontent une histoire pouvant tenir sur un timbre-poste. Cette histoire est emballée, mais de façon maladroite, dans un documentaire sur la Nouvelle Zélande et un étalage d’érudition sur les dessinateurs de comics de la première moitié du XXème siècle. Comme il y est question de dessinateurs de BD, des planches de BD sont insérées dans l’histoire, planches qui sont encore plus mal dessinées et sans intérêt que le reste de l’album...
Il y a une très subtile mise en abyme puisqu’un dessinateur de BD sans talent, sans inspiration et déprimé (Dylan Horrocks, l’auteur, qui est le premier personnage qui apparaît dans l’album) nous raconte l’histoire d’un critique de BD faisant un reportage sur un dessinateur de BD célèbre et insupportable (Dick Burger), grâce à l’aide d’un dessinateur de BD sans talent, sans inspiration et plutôt déprimé (Sam Zabel). Dylan Horrocks et le critique de BD reçoivent de mystérieuses planches de BD, ce qui augmente la profondeur de l’ensemble et il ne s'agit donc plus d'un abyme mais d'un véritable gouffre. Et, sans doute parce que Hicksville (Cf. la 4ème de couverture) a été « Publié pour la première fois en 1998 et largement acclamé », cette nouvelle édition comprend une préface de Dylan Horrocks où il nous raconte que son papa lisaient des BD quand il était jeune et que lui-même en lisait quand il était petit, avec un style très inspiré de L’art invisible de Scott McCloud. Ce making-of très solennel nous donne le sentiment que nous allons lire une BD d’exception, ce qui n’est absolument pas le cas.
Je comprends parfaitement que certains comics à l’anglo-saxonne, à la différence de la BD franco-belge, soient constitués de petites planches en noir et blanc imprimées sur du papier de seconde qualité et reliées dans de petits fascicules souples. En revanche, j’ai été agacé de voir ici des planches au dessin sommaire mises en valeur par de larges bordures noires et contenant beaucoup de fonds noirs, imprimées sur un papier très épais et avec une grosse couverture cartonnée, le tout faisant 262 pages sans le glossaire et pesant presque 1,2 kg. Ce décalage complet entre le fond et la forme est presque plus scandaleux que la médiocrité de la BD elle-même.