« 6 pieds sous terre » est une maison d'édition qui cherche avant tout à donner de la liberté aux auteurs. Dans « La clôture », Fabcaro profite de cette liberté pour délivrer un récit complètement absurde et expérimental. Difficile à définir ce qu'est « La clôture ». Avant tout, cet ouvrage décrit la difficulté pour un auteur (en l'occurrence, Fabcaro) d'écrire des scénarios quand on est empêtré dans le quotidien (avec notamment une clôture à réparer).

Pourtant dans les premières pages, point de présence autobiographique de l'auteur. On démarre le tout sur des personnages fictionnels. Très intrigué par le début de l'histoire, le lecteur est rapidement rassuré lorsque la compagne de Fabcaro déclare, en lisant ces mêmes pages : « Mais... C'est totalement incohérent... On comprend rien du tout... ». L'auteur déclare alors qu'il est au bord de la dépression et qu'il n'arrive pas à scénariser avec tout ce qu'il a à faire à côté...

Et justement, malgré tout cela, Fabcaro va pourtant nous scénariser une histoire entre Sonia et Pierre. La première ne rencontre que des losers et voudrait trouver quelqu'un. Le second cherche avant tout un emploi mais semble complètement incompétent pour cela. Ils finiront quand bien même par se rencontrer après de nombreuses péripéties. Laissant libre court à son imagination, les scènes se succèdent sans lien apparent entre elles.

Au fur et à mesure des pages, Fabcaro s'intègre dans sa propre fiction, se mettant alors à parler avec ses « acteurs » de ses états d'âme. Pendant ce temps, l'histoire continue... Cette partie autobiographique, sous une apparence classique, est toujours agréablement mise en scène par Fabcaro. Outre le comique absurde de répétition, on retrouve l'auteur devant ses contradictions : faire un ouvrage original au risque d'en « vendre huit ». La panne d'inspiration reste évidemment le principal sujet de l'ouvrage, puisqu'il est la raison du bordel incroyable qu'est « La clôture » : ne sachant qu'écrire, Fabcaro fait n'importe quoi, essayant des choses diverses et variées. Evidemment, les dernières pages amènent un éclaircissement salvateur et « La clôture » prend alors tout son sens.

Malgré la confusion volontaire du récit, on rit beaucoup dans cet ouvrage. Les dialogues, les situations absurdes, le mélange des genres... Fabcaro maîtrise son humour si particulier et personnel avec maestria. Qu'importe le personnage ou le lieu, l'auteur parvient à nous arracher des rires avec un sens du contre-pied incroyable.

Au niveau du dessin, j'avoue être très fan du trait de Fabcaro. Ses personnages aux longs cous sont très expressifs. Mention spéciale aux silences, parfaitement retranscrits graphiquement, souvent par une répétition maîtrisée et intelligente de la case.

« La Clôture » est une œuvre exigeante. La feuilleter dans une librairie ou une bibliothèque risque fort de faire hésiter le lecteur. Doté d'un humour efficace et d'une mise en abîme originale, cette bande-dessinée, très expérimentale, n'en est pas moins avant tout une véritable histoire avec ses personnages, ses retournements de situation. Un monument de l'absurde.
belzaran
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le 9 nov. 2011

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