Critique du run complet (tomes 1 à 7)
James Tynion IV réalise un véritable tour de force avec son run sur Detective Comics, en mettant au premier plan non seulement Batman, mais surtout la Batfamily dans son ensemble. Cette série devient rapidement un terrain fertile pour explorer les dynamiques d’équipe, la fragilité des liens familiaux et les dilemmes moraux qui hantent les protecteurs de Gotham. Ce qui frappe d’emblée, c’est la volonté de Tynion de remettre en question les méthodes du Chevalier Noir. Peut-on vraiment sauver Gotham seul ? Quels sacrifices exige une mission aussi immense ? Ces interrogations sont incarnées à travers les membres de la Batfamily, qui deviennent chacun des miroirs des propres limites de Bruce Wayne.
Orphan : La force silencieuse
Cassandra Cain, alias Orphan, s’impose comme l’un des personnages les plus marquants de ce run. Véritable incarnation de l’efficacité martiale, elle brille par ses combats impressionnants, chorégraphiés avec une intensité rare. Tynion parvient à capter son essence : une guerrière redoutable, presque invincible, mais profondément marquée par un passé douloureux. Ce contraste entre sa fragilité émotionnelle et sa puissance physique donne lieu à des moments poignants. Ses interactions avec le reste de l’équipe, notamment Clayface, enrichissent son arc narratif et ajoutent une dimension humaine qui la rend d’autant plus attachante. Ses duels sont un régal visuel et narratif, soulignant à quel point elle est une force incontournable de cette Batfamily.
Clayface : L’antagoniste réhabilité
Clayface, alias Basil Karlo, bénéficie d’un traitement exceptionnel. Habituellement relégué au rang de monstre, il est ici humanisé de façon bouleversante. Tynion explore sa quête de rédemption, ses efforts pour maîtriser ses pulsions destructrices et sa volonté sincère de changer. Sa relation avec Orphan est sans doute l’une des plus belles réussites de ce run. Touchante, fragile, cette dynamique entre l’ancienne tueuse conditionnée et le monstre cherchant à redevenir humain apporte une profondeur émotionnelle rare. Leur lien met en lumière les thèmes de la rédemption et du pardon, tout en offrant un contrepoint tragique à l’inévitable chute de Clayface. Pour un fan de ce vilain, c’est un véritable cadeau narratif.
Batwoman : Le pilier de l’équipe
Batwoman, alias Kate Kane, est l’épine dorsale de cette nouvelle Batfamily. Tynion lui confie un rôle de leader, souvent en opposition directe avec les méthodes de Batman. Elle incarne une approche plus militaire, plus structurée, mais aussi plus rigide. Son expérience et son pragmatisme font d’elle une figure d’autorité respectée, mais sa vision plus brutale de la justice la place en porte-à-faux avec Bruce. Ce conflit latent entre les deux leaders apporte une tension palpable, soulignant les failles du système mis en place par Batman. Kate n’est pas simplement une seconde Batman : elle est une guerrière, une stratège, mais aussi une femme confrontée à ses propres démons familiaux. Sa relation compliquée avec son père, le colonel Jacob Kane, ajoute une couche de drame familial qui résonne avec les autres membres de l’équipe.
Une Batfamily réinventée
L’un des grands succès de Tynion IV réside dans la construction de cette équipe hétéroclite. Chaque membre trouve sa place, que ce soit Red Robin (Tim Drake), Spoiler (Stephanie Brown) ou encore Azrael. Chacun apporte sa vision de la justice, sa propre manière de fonctionner, et l’ensemble forme un kaléidoscope fascinant des différentes facettes du combat pour Gotham. Les interactions entre les personnages sont soignées, et le lecteur s’attache à cette famille de substitution où les conflits, les trahisons, mais aussi les moments de grâce abondent.
Un très bon run
En définitive, ce run de Detective Comics est une réussite complète. Tynion IV offre une exploration profonde des membres de la Batfamily, en questionnant les fondements mêmes de la croisade de Batman. L’accent mis sur des personnages comme Orphan et Clayface apporte une richesse émotionnelle rare, et la présence forte de Batwoman comme leader structurée permet de renouveler les dynamiques internes. C’est une lecture incontournable, idéale pour ceux qui souhaitent découvrir l’univers de Gotham à travers des personnages souvent sous-estimés mais essentiels.