La rédaction d'un avis sur cette bande dessinée a un peu tardé parce que l'exercice s'annonce difficile. A l'heure où certains romans chauds sortent de l'ombre pour venir se poser en tête de rayon, à l'heure où on lève les tabous sur la sexualité tout en ne sachant plus en aborder le sens, arrive La nuit mange le jour. Une bande dessinée qui ne mérite pas d'être rangée dans le rayon pornographique tant le syndrome grippal que peut provoquer la lecture est impressionnant, entre sueurs chaudes et sueurs froides...un résultat qui n'avait peut être pas été vu depuis Le bleu est une couleur chaude.
L'écriture de Hubert donne au scénario une certaine noirceur que l'on avait déjà pu apprécier dans la série des Ogres-dieux et il renoue avec le thème de la sexualité qu'il avait abordé dans Monsieur désire ?. Cette fois,on rencontre Thomas, jeune homme peu sûr de lui qui a encore des difficultés à assumer son homosexualité. Le jour où il rencontre Fred, il en apprend plus sur lui, sur ses fantasmes et sur le plaisir suscité. Il fait aussi indirectement la connaissance d'Alex, ancien modèle toujours présent dans les oeuvres photos de Fred. Une compétition fascinée se profile entre lui et ce jeune homme parfait qui hante encore les murs. Les complexes finissent par nourrir une obsession malsaine pour les limites que lui-même serait capable de franchir par amour. Loin d'être un scénario trash qui ne le serait que pour montrer fièrement sa mention "public averti", l'histoire dérange par ces limites repoussées constamment, par ces fantasmes posés sur papier...loin des livres qui ne font que grossir le trait, l'écriture et le dessin réaliste d'une certaine intimité nous mettent face à ces peurs et ces hontes que l'on peut ressentir parfois. De la même manière, quand Thomas se confie à l'une de ses amies, rien n'est surjoué. Abordant de façon brutale l'homosexualité masculine et le rapport à l'art, le livre ancre aussi le thème a des portraits psychologiques soignés. Personnellement j'ai aussi apprécié que le thème de la séropositivité ait été subtilement abordé. Enfin, Paul Burckel a su utiliser toutes les nuances de gris (tellement plus subtilement que le font certains romans...) pour mettre en image un amour passionné et passionnant. Un livre qui pose beaucoup questions, ce qui est toujours mieux que de nous servir stéréotypes et réponses creuses. Un projet graphique ambitieux qui s'il ne plaira pas tout le monde aura le mérite d'avoir été mené avec doigté, malgré la difficulté de son thème.

Mawelle
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le 13 août 2017

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