Avec l’avènement de l’autobiographie, de nombreuses bandes dessinées traitent de la maladie et du handicap. Souvent elles montrent la difficulté de la rémission, de l’acceptation, du dialogue avec le milieu hospitalier… En 2010, Élodie Durand publie « La parenthèse ». Cette parenthèse, c’est plusieurs années qu’elle passe à dormir et à oublier. Elle a alors à peine plus de 20 ans. Le tout est publié chez Delcourt et a obtenu le Prix Révélation du Festival d’Angoulême.
Élodie Durand souffre d’épilepsie. Ses crises, courtes, ne lui laissent aucun souvenir. Si bien que la jeune fille est dans le déni complet. Sa famille a beau lui en parler, elle considère que ce n’est pas un problème. Mais l’aggravation des symptômes va l’obliger à affronter cette maladie qu’elle minimisera jusqu’au bout.
Ce qui est intéressant avec le bouquin, c’est que l’auteure a souffert de forts problèmes de mémoire. Du coup, elle reconstitue ses souvenirs avec sa famille. Ainsi, on observe une double narration entre ce que nous dit la jeune femme et ses parents. C’est un vrai travail de reconstitution qu’a effectué Élodie Durand.
Si le témoignage est glaçant (hypocondriaques, s’abstenir !), on ressent finalement peu d’émotion pour le personnage, en déni perpétuel. La notion de souffrance est finalement assez absente. C’est vraiment au début de l’ouvrage (et à la fin), où le personnage se rend compte que des années de sa vie sont passées comme si elles n’avaient jamais existé.
Il est difficile de lâcher « La parenthèse ». Même si la présence du livre montre que l’auteure a guéri (du moins suffisamment), le suspense perdure dans ce qu’elle va endurer. On découvre les techniques de l’époque (on est au milieu des années 90). Élodie Durand nous propose aussi ses extraits de carnet de l’époque. C’est noir et cela enrichit l’état d’esprit dans lequel elle pouvait être.
Au niveau du dessin, malgré quelques tentatives intéressantes, cela reste assez limité. Le dessin est agréable à l’œil mais manque d’originalité ou de personnalité. Quand on voit comme, sur le même sujet, d’autres auteurs ont sublimé graphiquement les sensations (David B. dans « L’ascension du haut-mal » sur l’épilepsie aussi, ou « Quand vous pensiez que j’étais mort » de Matthieu Blanchin sur le coma), on reste un peu sur sa faim. Mais quelques bonnes idées viennent relever l’ensemble.
Élodie Durand produit un livre entièrement centré sur elle. C’est assez étonnant. « La parenthèse » est donc un témoignage sur l’épilepsie. N’espérez pas y trouver de généralités. Glaçant, avec une distance créée par les pertes de mémoire de l’auteure, il ne laissera personne indifférent.