En ces glorieuses années 80 où l'on faisait du jeu de rôles, les éditions Soleil n'existaient pas et les amateurs de fantasy en BD francophones se trouvaient frustrés. C'est pourquoi ils se rabattaient sur un petit nombre de volumes, dont celui-ci.
Or, il se trouve que je n'ai jamais été capable de le lire. Il m'a fallu m'y reprendre à cinq tentatives avant d'en venir à bout.
La faute au dessin, essentiellement. La couleur directe de Ségur présente un gros inconvénient : il multiplie les cernes noirs autour des objets qu'il dessine, même en arrière-plan, auxquels il ajoute des effets d'ombre et de lumière presque trop riches. Or, c'est soit l'un, soit l'autre. Ouvrez aux premières pages : il n'y a aucun contraste global, aucun élément ne se détache du reste, l'œil se retrouve perdu.
Quant au scénario, j'ai du mal à m'y intéresser car je ne comprends rien aux motivations des personnages. D'une part, ce sont des stéréotypes vraiment très grossiers, d'autre part les raisons qui les poussent à avancer dans leur quête ne sont pas convaincantes. Pourquoi le voleur prend-il autant de risques pour rester avec les nains sans être sûr d'en retirer un profit ? Pourquoi laisser croire au lecteur que les nains ne disent pas tout de leur objectif, alors qu'en fait, si ? Et on ne sait rien de leur passé ou de leurs conflits intérieurs, les seuls obstacles qu'ils rencontrent sont externes. Bof.
Récemment, j'ai ENFIN pu tout lire au cours d'un week-end, et j'ai constaté que tous les défauts que je reprochais au premier volume s'atténuaient à partir du troisième tome. A vrai dire, ça commence même à valoir vraiment le coup à partir de ce troisième : l'histoire devient réellement épique et le dessin acquiert une très belle profondeur. Mais comment voulez-vous apprécier la qualité d'un cycle avec une mauvaise entrée en matière ?