Le Chant d'Apollon est à l'image de son contexte de sortie : une période phare, où l'éducation sexuelle s'infiltre jusque dans les mangas, avec des auteurs comme Go Nagai qui n'hésite pas à en faire le sujet central de certaines de leurs œuvres, comme avec Le Chant D'Apollon.
Sorti en 1970, ce one-shot de presque 600 pages, écrit et dessiné par le maître Osamu Tezuka, propose une histoire à la croisée des chemins qui oscille entre quête initiatique vers la compréhension de l'amour... et thriller psychologique.
Tel Sisyphe et son rocher, Tezuka illustre ce sentiment profond et particulier comme une charge parfois douloureuse et sans fin, qui s'insérerait dans un cycle de réincarnation perpétuelle, tel le Samsara du courant bouddhiste. Le personnage principal, Shogo, incapable d'aimer à cause d'un traumatisme remontant à son enfance, subit une thérapie quasi-freudienne ainsi qu'une punition mythologique à cause de sa cruauté envers des animaux, dont l'objectif affiché est de lui inculquer la notion d'Amour.
Des femmes dont il tombera amoureux, il y en aura alors, mais seule la Mort les attend au tournant de leurs idylles.
Influencé par les cycles de réincarnation, Shogo vogue entre divers ambiances et temporalités, allant d'une cité futuriste et dystopique peuplée d'androïdes (ce qui offre en parallèle une réflexion sur le clonage et la pollution engendrée par l'Homme) jusque dans un camp de déportation durant les années 40.
Traumatisé par le passé et en proie à un doute envers l'avenir, Tezuka illustre son odyssée psychologique par des panels somptueux et symboliques, ainsi que par un sens du découpage et de la mise en scène unique pour l'époque.
Avec son Chant d'Apollon, il dévoile un message à la portée universelle autour de la quête de l'amour véritable et de la reconnaissance de ses sentiments, dont l'essence est encore intact de nos jours.