Alors que le mangaka Gou Tanabe ouvrait le bal avec une adaptation en deux tomes des Montagnes Hallucinées frisant la perfection pour enchaîner ensuite sur deux grands écrits du fou de Providence, que sont Dans L'abîme du Temps et La Couleur Tombée du Ciel, tout deux de grands récits denses et complexes à adapter, on était alors en mesure d'imaginer une prochaine adaptation plus simple, pour pouvoir ensuite reprendre avec un nouveau récit clé dans l'édifice Lovecraftien.
Mais que nenni, nous lance à la figure Tanabe, puisqu'il empile avec sûrement l'un des plus grands récits du mythe de Cthultu, qui aura cimenté les bases de ce qu'allait devenir, bien des années plus tard, l'un des textes phares de l'auteur : L'appel de Cthultu.
À la base du texte de 40 pages, l'auteur développait sur 6 parties, avec différents points de vue, le réveil imminent d'un des Grands Anciens, dans sa demeure engloutie nommée Rlyeh. Au travers de journaux de bord et de témoignages, l'horreur prenait doucement forme, s'insinuant à travers tout le globe via des rites païens et violent, pour asseoir une domination future sur la race humaine, et la libérant ainsi des travers du Bien et du Mal.
Dans cette adaptation, le mangaka étale une nouvelle fois sa maîtrise des décors charbonneux, offrant une opacité et une moiteur à la cité de Rlyeh, et mettant un visage sur l'une des plus grandes entités innommables du panthéon des Grands Anciens. Avec une série de sublimes doubles pages où le chaos est légion, l'auteur témoigne d'un profond respect du matériau de base, tout en se permettant d'étoffer certains passages du récit original avec une liberté somme toute contrôlée.
Gou Tanabe offre une énième adaptation presque sans fautes, car l'on pourrait lui reprocher un certain manque de maîtrise dans le dessin des visages de ses protagonistes ainsi que dans certains panoramas urbains un brin brouillon. Mais tout cela ne sont que des chipotages en comparaison de la qualité globale du produit fini, véritable hommage au travail de Lovecraft et offrant toute confiance dans la suite de son travail d'adaptation.